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Philippe Ginestet, l’homme qui flaire les bonnes affaires


En 35 ans, cet entrepreneur de 62 ans a su transformer une solderie de province en un groupe qui pèse plus de 1,1 Md€ de CA, prouvant ainsi que ses idées ont vraiment du génie et que l’on peut réussir dans un secteur peu glamour et en restant provincial.  

En 35 ans, cet entrepreneur de 62 ans a su transformer une solderie de province en un groupe qui pèse plus de 1,1 Md€ de CA, prouvant ainsi que ses idées ont vraiment du génie et que l’on peut réussir dans un secteur peu glamour et en restant provincial.
 

 

De solides ambitions

Avec 444 magasins en France (et 526 à l’international, avec le rachat du Belge Trafic), ce qui en fait le 1er groupe français de distribution de produits non-alimentaires, GiFi possède déjà un réseau de belle taille.

Si le cap des 500 points de ventes dans l’Hexagone devrait être franchi en 2017, l’enseigne souhaite poursuivre son expansion, avec l’objectif d’atteindre, par le biais d’ouvertures de points de vente en propre et en concession d’enseigne 1.000 magasins et 10.000 collaborateurs à l’horizon 2027.

Un autodidacte volontaire

«Je voulais réussir, sans avoir pensé exactement ce que ça pouvait signifier» raconte le créateur de GiFi, qui n’avait pas franchement les clés du succès : «Je n’ai pas été très sérieux jusqu’à mes 18 ans. À partir de là, j’ai voulu étonner mes parents et leur prouver que je pouvais être le meilleur dans leur métier. Ils étaient maquignons. Puis j’ai vendu des aspirateurs pour Electrolux, j’ai été meilleur vendeur de France car je voulais étonner mes supérieurs. J’ai toujours voulu étonner les autres». C’est aujourd’hui chose faite.

Fidèle à Villeneuve-sur-Lot

L’aventure débute ici en 1981, où Philippe Ginestet a ouvert son premier point de vente, « GiFi le vrai soldeur», en utilisant les premières syllabes de son patronyme comme marque. Trente-cinq ans après, le siège du groupe est toujours basé dans cette petite ville de 23.000 habitants à 30 kilomètres d’Agen.

«Notre cœur est ici comme est ici le cœur de nos 660 collaborateurs. La fidélité de mes collaborateurs dépasse largement l’écueil des coûts de logistique. Même si ça coûte de l’argent, je veux rester à Villeneuve, c’est là que tout a commencé» affirme le patron local, qui vient d’ailleurs d’ouvrir un second magasin dans sa ville.

L’effet boule de neige

Si Philippe Ginestet a ouvert rapidement plusieurs magasins, ce n’est pas, au début du moins, par vision stratégique. « À l’ouverture du premier GiFi, il y avait du monde partout, les gens faisaient la queue. Un ami m’a demandé si j’étais content : j’ai répondu que oui, que j’espérais que ça allait durer. Et il m’a alors dit quelque chose que je n’ai jamais oublié : « Mais ça, c’est l’effet ouverture, ça ne va pas durer justement. » J’ai compris qu’il avait raison. Et j’ai ouvert un 2ème puis un 3ème et un 4ème magasin». J’aurais pu m’arrêter là, mais avec les opportunités, l’entreprise a grandi.

Héritier désigné

Philippe Ginestet implique toujours son fils Alexandre, directeur général depuis 2008, dans l’évolution du groupe. Un enthousiasme partagé par celui qui déclare : «Avec mon père, nous formons un binôme de choc pour développer l’entreprise familiale !». GiFi, Alexandre est tombé dedans très tôt, en accompagnant sa mère, Martine, en Asie, dans ses tournées auprès des fournisseurs. Il est entré dans le groupe à 17 ans, avant de devenir responsable des achats à 25 ans. Et c’est-lui qui est à l’origine du nouveau concept GiFi, le «discount moderne».

Une belle histoire

En 2013, Thierry Boukhari, directeur des relations et ressources humaines de GiFi depuis 2009, a été nommé directeur délégué du groupe. Aux côtés de Philippe Ginestet (P-DG) et de son fils Alexandre (DG), Thierry Boukhari coordonne «toutes les missions inhérentes à l’accompagnement stratégique, à la supervision et à l’organisation globale de l’entreprise».

Une belle promotion pour un collaborateur qui a fait ses premiers pas dans l’entreprise en 2003, en tant que… stagiaire au service paie, avant de grimper rapidement les échelons : responsable paie adjoint, en 2005, responsable paie en 2007, responsable des ressources humaines en 2008 et, enfin, DRH en 2009.

Coup de frayeur

Ça n’arrive pas qu’à Kim Kardashian ! En octobre dernier, le P-DG de GiFi et son épouse Brigitte se sont faits braquer par 3 malfaiteurs ayant simulé une collision avec leur taxi sur une bretelle d’accès d’une autoroute entre l’aéroport du Bourget et Paris, se faisant dérober des bijoux et une montre de luxe pour une valeur d’environ 100.000 euros.

«Vu le déroulement des faits, la configuration des lieux, cela me paraît impossible que ce fusse ma personne qui était visée» a-t-il estimé, assurant avec philosophie que ce sont «des choses qui arrivent».

Pour l’ouverture le dimanche

Sans surprise, le patron de GiFi est pour l’ouverture dominicale : «On a fait réaliser des sondages auprès de nos clients. 95 % sont des clientes et venir dans un magasin GiFi, pour elles, c’est une destination de promenade. Et 59 % des clientes entrent dans nos magasins sans avoir en tête d’article bien précis à acheter. Alors s’agissant d’achat plaisir, le dimanche est forcément un bon jour. Après, nous nous adaptons aux particularismes locaux». Les magasins gérés par des mandataires qui sont donc les patrons, sont déjà, eux, tous ouverts le dimanche.

Sourcing asiatique

Il n’y a pas de miracle. Pour proposer des prix discounts, GiFi s’approvisionne de l’autre côté du monde. Dès 1988, GiFi a créé sa propre centrale d’achats. Les achats sans intermédiaire font aujourd’hui partie de l’ADN du groupe. GiFi est présent à Hong-Kong et en Chine (filiale à Ningbo, bureaux à Shenzhen) accédant à l’ensemble des fournisseurs en Asie du Sud-Est, du Pakistan aux Philippines et de l’Inde au Vietnam.

La force de l’humain

Est-ce parce qu’il est lui-même autodidacte que Philippe Ginestet accorde beaucoup d’importance aux ressources humaines ? «L’humain est le cœur de l’entreprise. GiFi est un groupe qui mise sur les femmes et les hommes qui le composent et qui ensemble par leur investissement ont permis son développement».

Au-delà des discours convenus sur l’importance des collaborateurs, le patron de GiFi est réellement engagé sur le sujet, ce qui lui a valu d’être distingué à deux reprises par le label Top Employeur. En 2012, pour les 30 ans de l’entreprise, Philippe Ginestet s’est payé une page de publicité dans 58 journaux nationaux et régionaux, dans laquelle il s’adressait à ses 4.000 collaborateurs pour leur dire « 4.000 mercis.». Et c’est avec sa nouvelle épouse, Brigitte, qu’il part à la rencontre des collaborateurs dans les magasins.

Un ami encombrant

S’il est très discret sur ses idées politiques, Philippe Ginestet était un proche de Jérôme Cahuzac. Avant d’être le ministre délégué au Budget tombé en disgrâce que tout le monde connaît, le médecin était le maire de Villeneuve-sur-Lot, un notable incontournable que l’on croisait au club-house du 18-trous ou à la Toque blanche, le meilleur restaurant local, souvent en compagnie du propriétaire… Philippe Ginestet. Mais ça, c’était avant !

Une jolie fortune

Avec une fortune personnelle estimée à plus de 400 M€, le plaçant au 166e rang français, Philippe Ginestet a les moyens de se faire plaisir, même s’il n’en abuse pas. S’il possède son avion privé, c’est plutôt un outil de travail. Et plutôt que de claquer son argent, il investit à titre personnel dans le tourisme et le vin.

Philippe Genestet est ainsi propriétaire du Château-Lalande dans le Bordelais, du complexe Le Stelsia à Pujols à côté de Villeneuve-sur-Lot et de l’hôtel de luxe Les Chalets Saint-Philippe à Megève. À croire que cet homme est comme le roi Midas…

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