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Philippe Oddo, poids lourd de la finance franco-allemande


En rachetant l’allemand BHF, cet héritier de 57 ans, qui a fait toute sa carrière dans l’entreprise familiale, s’est imposé comme un bâtisseur, à la tête d’un groupe qui tient tête aux grands réseaux bancaires.

Entreprendre - Philippe Oddo, poids lourd de la finance franco-allemande

En rachetant l’allemand BHF, cet héritier de 57 ans, qui a fait toute sa carrière dans l’entreprise familiale, s’est imposé comme un bâtisseur, à la tête d’un groupe qui tient tête aux grands réseaux bancaires.

Cinquième génération

L’histoire du groupe remonte à 1849. À l’origine société d’agent de change marseillaise, elle s’est établie à Paris sous la direction de Bernard Oddo, le père de Philippe, qui en fait à la fois une banque privée et une banque d’affaires, et change radicalement de taille. Si la famille est toujours l’actionnaire principal (42% des parts), elle a ouvert le capital aux collaborateurs (30%).

Appétit d’ogre

Oddo s’est développée par de nombreuses opérations de croissance externe (Delahaye Finances, Pinatton, Crédit Lyonnais Securities Europe, Banque d’Orsay, Banque Robeco). La dernière en date, le rachat en début d’année de l’Allemand BHF Kleinwort Benson, lui a permis de doubler la taille de l’entreprise qui réalise aujourd’hui 577 M€ de CA, changeant de nom à l’occasion, passant de Oddo & Cie à Oddo-BHF.

Une tête bien pleine

Philippe Oddo est souvent présenté comme un «multi-diplômé». Et c’est vrai que son CV est impressionnant. Après des études à Paris-Dauphine, il a suivi un cursus international dans les universités de New York aux États-Unis et de Cologne en Allemagne (il parle parfaitement l’allemand), avant d’obtenir un diplôme à HEC en 1984.

Pépinière de talents

Oddo & Cie a fait éclore quelques pointures de la finance française, comme Fatine Layt, qui a pris en début d’année la direction de la banque d’affaires américaine LionTree France, ou Thierry Flecchia, un ancien condisciple de Philippe à HEC, qui a été l’un des gérants vedettes d’Oddo, en charge des valeurs moyennes, avant de créer sa propre société de gestion de portefeuilles, Flinvest, notamment réputée pour Entrepreneurs, son fonds en actions.

Fidèle lieutenant

Grégoire Charbit figure sur le site de la société financière comme l’un des 3 mandataires sociaux, membre du Collège de la gérance, en charge du juridique, de la conformité et de la stratégie. Cet avocat de formation, karateka de bon niveau, est le bras droit particulièrement discret de Philippe Oddo depuis plus de 20 ans. Il a notamment piloté les opérations de croissance externe et de diversification.

Alliance de styles

L’un est aussi discret que l’autre a été flamboyant. Les deux banquiers d’affaires, que tout semble opposer ont pourtant conclu en février une alliance sur le marché primaire actions en France, sous la forme d’une joint-venture non capitalistique. Oddo-BHF accède ainsi aux grands groupes et fonds d’investissement de la société de conseil cofondée par Jean-Marie Messier et Erik Maris, il y a 7 ans.

Tir aux pigeons

Comme beaucoup de grands dirigeants, Philippe Oddo est membre du Siècle, l’un des cercles les plus puissants de la capitale. Il est également membre d’un club mondain où se rencontrent des hommes de pouvoir, le Cercle du bois de Boulogne, aussi connu sous le nom de Tir aux pigeons, où il côtoie des patrons comme Geoffroy Roux de Bézieux.

Soutien de campagne

Pour la présidentielle de 2017, le banquier privé a mis son carnet d’adresses et ses réseaux au service du candidat des Républicains, facilitant des levées de fonds ou des rencontres avec des patrons étrangers. Une relation ancienne, puisque le frère de l’ancien directeur de cabinet adjoint de Fillon à Matignon, Antoine Gosset-Grainville, a travaillé chez Oddo & Cie entre 2003 et 2005.

Parce qu’il le vaut bien

À l’occasion de l’acquisition du groupe allemand BHF, Philippe Oddo a accueilli plusieurs nouveaux actionnaires au capital de sa société, dont Allianz, la société de gestion Boussard & Gavaudan, mais aussi le principal actionnaire de L’Oréal, la famille Bettencourt-Meyers, via sa société de portefeuille Téthys, qui a apporté 100 M€, soit 7% du capital.

Full Metal

Au fil de ses opérations d’acquisitions, Oddo & Cie a repris en 2006 des activités de fourniture de métaux, cuivre et principalement aluminium. Dirigé par un ancien de Pechiney, Antoine Chacun, Oddo Metals pèse aujourd’hui 1,1 Md€ de CA et détient 20% du négoce de l’aluminium en Europe. Pas mal pour une activité «secondaire».

Le pari de Pascal

Le frère aîné de Philippe, Pascal, a été associé-gérant puis président de Oddo & Cie jusqu’en 1998. Si les raisons de son départ ne sont pas connues, il n’a pas mal réussi de son côté. Il a rejoint le fonds de private equity LBO France Gestion (3 Mds€ d’en-cours, participations dans Materne, Promovacances-Fram ou The Kooples) dont il préside le conseil de surveillance et possède un peu plus d’un tiers avec son président, l’ancien haut-fonctionnaire Robert Daussun.

Vieux gréement

Bien que sa fortune personnelle soit estimée à 550 M€, le classant 125ème français, Philippe Oddo n’a rien de «bling-bling». Il a cependant craqué pour Olympian, un voilier plus que centenaire découvert dans un hangar de Chicago par le navigateur Bruno Troublé. Mais il ne s’agit pas de paraître. Le vétéran est engagé dans des courses, comme la Corsica Classic, qu’il a remporté en 2014 et 2016. Car, comme il l’a déclaré, «Si j’ai acheté ce bateau, c’est pour gagner !». On ne se refait pas.

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