Je m'abonne

« Pour une société de libre choix : L’échec de l’Etat », perspectives pour une France libérée


J’aurais donné à la couverture de cet ouvrage une présentation inverse de celle qui a été choisie. Car le mérite de Jean-Philippe Delsol et de Nicolas Lecaussin ne consiste pas essentiellement à faire la critique de l’Etat français, mais avant tout d’indiquer les principes et les modalités qui devraient inspirer la mise en place d’une société de liberté dans notre pays.

J’aurais donné à la couverture de cet ouvrage une présentation inverse de celle qui a été choisie. Car le mérite de Jean-Philippe Delsol et de Nicolas Lecaussin ne consiste pas essentiellement à faire la critique de l’Etat français, mais avant tout d’indiquer les principes et les modalités qui devraient inspirer la mise en place d’une société de liberté dans notre pays.

Les auteurs n’ont pas fait dans la facilité, mais dans la créativité, ouvrant les perspectives d’une France libérée. Pour autant, il ne s’agit pas d’un programme de réformes comme peuvent le concevoir certains candidats aux élections précédentes. Il y a plutôt juxtaposition harmonieuse de philosophie politique et de propositions concrètes pour se passer de l’Etat : éthique et empirisme.

J’ai été très sensible à la dimension éthique qui revient dans le livre comme un leitmotiv, rappelant que, quelle que soit la question soulevée, elle ne peut trouver de réponse que dans une référence à l’humanisme libéral. Le lecteur en est averti dès l’avant propos : « Tout cet ouvrage est tendu vers cet objectif d’imaginer des solutions possibles pour rétablir la grandeur de l’homme » (p.9)

La grandeur de l’homme

Quelques citations rappellent ce qu’elle est : responsabilité, espérance, éthique de vie, rejet de la grégarisation. Elles donnent à la société de liberté sa vraie justification : un humanisme fondé sur l’autonomie et la confiance (p.232) En tant qu’êtres humains nous sommes d’abord appelés à être responsables de nous-mêmes et de ceux qui nous entourent.

Sans responsabilité il n’y a pas d’humanité parce que c’est la responsabilité qui en est un caractère fondamental du genre humain, qui le distingue des animaux et des créatures inertes […] Cette responsabilité ne peut s’exercer que si l’homme qui la supporte dispose bien entendu de la liberté de faire ses choix. Sinon comment pourrait-il en être responsable ? (p.16)

Rendre à chacun la responsabilité de sa vie est non seulement souhaitable pour chacun, mais également nécessaire pour la société, qui explosera comme la grenouille de la fable si elle continue de faire augmenter sa sphère publique au détriment de la société civile. (p.20)

Les choix individuels sont plus productifs que ceux de l’Etat, car chacun connaît mieux que la collectivité ses besoins (p.117)

[Les] terrorismes sous diverses formes n’ont jamais prospéré que dans des pays affaiblis par un pouvoir dégénéré, un peuple ayant perdu son identité, l’oubli de toutes convictions, de toute espérance dans l’avenir et de toute éthique de vie… A l’image sans doute de l’Occident qui a versé dans une forme de nihilisme de ses valeurs fondatrices, de refus de la famille et de l’enfantement, de rejet du travail, du déni de ses ennemis de peur d’avoir à les combattre ». (p.220)

Comme le Grand Inquisiteur de Dostoïevski, [l’Etat] saura convaincre les hommes «  qu’ils ne seront libres qu’à partir du moment où ils auront renoncé à faire usage de leur liberté et l’auront sacrifiée dans un esprit de soumission sans retour ». (p.231)

Réduire la sphère publique

L’ouvrage se divise en quatre parties dont chacune démontre comment on peut se passer de l’Etat dans des domaines stratégiques. Il s’agit bien sûr d’exemples, puisque les auteurs ne prétendent pas couvrir tout le champ des réformes à réaliser. Partout il faut se libérer de l’Etat, de sa bureaucratie, de ses privilèges et de ses monopoles, pour mobiliser l’initiative privée, la concurrence et s’enrichir des expériences réussies à l’étranger, notamment en Allemagne, en Angleterre, en Suède, voire aux Etats Unis.

La première partie est consacrée à notre « système social », avec une idée directrice : l’assurance vaut mieux que l’assistance. « Le moyen de réduire les charges sociales n’est pas de tenter une énième correction d’un système défaillant, mais de l’ouvrir à la concurrence » (p.41) Au passage, l’idée du revenu universel est épinglée : « Cette allocation universelle détruirait la propriété et le travail sans lesquels le progrès et  la civilisation s’affadissent à défaut de la liberté de s’épanouir ». (p.68)

La réforme est de substituer la logique assurancielle à la logique redistributive. Ce changement est le seul de nature à sauver les retraites, en passant de la répartition à la capitalisation : 17 pays de l’OCDE sur 34 ont institué un système de retraites privées obligatoires en capitalisation. On remarque avec pertinence que la capitalisation est moins risquée que la répartition et que les fonds de pension accélèrent l’investissement et la croissance. De même les logements rendus à l’investissement privé locatif mettront fin à la crise actuelle, due à la priorité donnée aux « logements sociaux » onéreux et clientélistes. imposés par la loi ALUR (à supprimer bien sûr).

Les Français seraient sans doute moins inquiets d’une « casse sociale »  s’ils savaient ce que leur coûte vraiment la Sécurité Sociale, et les risques qu’elle leur fait courir ; ici la référence au salaire complet aurait mérité plus qu’une simple allusion (p.107)

La deuxième partie traite de la libération fiscale. Nous avons affaire ici à des experts, puisque l’IREF qu’ils dirigent a multiplié les travaux sur « le maquis fiscal » : impôts et taxes innombrables, niches fiscales (plus de 500), inégalités et spoliations, instabilité et rétroactivité.

La proportionnalité doit remplacer la progressivité, la flat tax (impôt à taux unique)  a donné des résultats remarquables dans les pays qui l’ont adoptée. Un chapitre d’un très haut niveau technique concerne l’impôt sur les sociétés et le débat entre harmonisation forcée souhaitée par Bruxelles et libre concurrence entre Etats souverains dans ce domaine. Les finances locales sont envahissantes et obsolètes, mais n’est-ce pas tout le jacobinisme français qui est en cause ?

La troisième partie traite de la liberté scolaire et universitaire. « Le vrai problème que personne n’ose évoquer est celui de la centralisation de l’enseignement public français et de sa syndicalisation qui ensemble empêchent depuis des lustres l’éducation dite nationale de s’adapter aux besoins des élèves et de la société  et qui en renchérissent sans fin les coûts et les charges. » (p.165).

L’enseignement privé échappe à la dérive en dépit de l’étouffement voulu par le ministère. Il faut lui donner une pleine et libre expansion, et les auteurs de souligner le succès des écoles privées hors contrat contre lesquelles Madame Vallaud-Belkacem est entrée en guerre. La privatisation a fait une percée spectaculaire à l’étranger (Pays Bas, Angleterre, Suède, Etats Unis). Les familles peuvent compter sur la prise en charge des frais grâce à des bons scolaires ou d’autres techniques : l’école pour tous est un principe respecté. Quant aux universités, elles sont partout (sauf en France) concurrentes, les étudiants trouvent diverses formes de financement qui ne créent aucun problème majeur.

La quatrième partie est une pétition pour « un cadre institutionnel stable et subsidiaire ». Il faut que l’institution européenne évolue dans la direction d’une zone de libre échange, c’est la bureaucratie bruxelloise qui a entraîné le Brexit, tandis que la gestion de la BCE est aberrante (on a soutenu contre toute raison le Grecin).

Au niveau national, il faut rompre avec la professionnalisation des politiciens, qui n’ont aucune connaissance de la société civile, aucune expérience de l’entreprise et de la concurrence. Un Etat fort est celui qui se limite au domaine régalien, mais là encore les privatisations ou les délégations au privé permettraient des progrès : auxiliaires de police et de justice, gestion et construction des prisons.

Enfin, et c’est la condition nécessaire pour toute rupture, il faut un retour à la société civile : quand l’Etat Providence est abandonné, quand l’Etat ne joue qu’un rôle subsidiaire, les problèmes apparemment les plus aigus actuellement (comme l’immigration) peuvent être résolus, et le populisme est désamorcé.

Les auteurs concluent sur une formule proche de celle jadis célèbre de Jean Marc Varaut : « Faites la liberté, la liberté fera le reste. » Les 256 pages de « L’Echec de l’Etat » que vous devez lire et travailler vous confirmeront dans votre engagement libéral, et vous offriront exemples, données historiques ou chiffrées, sources étrangères, de nature à convaincre autour de vous, et en prime une bonne bouffée d’humanisme et d’espérance.

Echec de l’état : Pour une société de libre choix

de Jean-Philippe Delsol, Nicolas Lecaussin

éditions du Rocher

janvier 2017

À voir aussi