Entre juin et octobre 2024, 50 % des dirigeants interrogés par EY estiment que l’attractivité de la France s’est dégradée. En conséquence, 49 % des entreprises ont réduit ou reporté leurs projets d’investissement. Même si aucune entreprise étrangère n’a annulé ses engagements, 84 % des décisions d’investissement prévues pour 2024 ont été repoussées à 2025 ou au-delà. Le Royaume-Uni, perçu comme plus attractif par 42 % des dirigeants, semble profiter de cette situation pour capter davantage d’investissements, malgré ses propres défis économiques et politiques.
Le contraste est saisissant avec les années précédentes : depuis 2019, la France s’imposait comme la destination la plus attractive d’Europe pour les investissements étrangers. Cependant, la dissolution de l’Assemblée nationale en juin 2024, couplée à une instabilité politique croissante, a profondément affecté la perception des investisseurs internationaux.
Les causes du désengagement
L’incertitude politique, notamment liée à la dissolution de l’Assemblée nationale, a été identifiée par 59 % des dirigeants comme le principal frein à l’investissement. Les investisseurs soulignent le ralentissement des réformes structurelles, comme la simplification administrative ou les initiatives de réindustrialisation, ainsi qu’une remise en question des politiques publiques dans des secteurs clés
Le coût élevé du travail en France, combiné à des craintes de hausse de la fiscalité sur les entreprises et les ménages, inquiète également les investisseurs. Près de 30 % des dirigeants interrogés mentionnent l’instabilité budgétaire et économique comme un frein important. Le rapport EY souligne aussi des doutes sur la capacité du gouvernement à maintenir des dispositifs attractifs, comme le Crédit Impôt Recherche, face à des tensions budgétaires croissantes.
Le Royaume-Uni et les États-Unis continuent d’attirer des capitaux grâce à une stabilité politique et fiscale perçue comme supérieure. En outre, les tensions géopolitiques en Europe, combinées à un risque croissant de protectionnisme américain, affaiblissent la position de la France dans la compétition mondiale.
Conséquences pour l’économie française
Le désengagement progressif des investisseurs étrangers menace directement plusieurs secteurs stratégiques. Selon l’étude EY, seulement 15 % des dirigeants envisagent d’ouvrir des centres de décision en France d’ici 2027, contre des niveaux bien plus élevés dans d’autres pays européens. Les projets de réindustrialisation et de décarbonation, pourtant essentiels à la transition écologique, enregistrent également une baisse des intentions d’investissement, avec moins de 50 % d’entreprises prêtes à s’engager dans ces domaines.
Les PME françaises, souvent dépendantes des capitaux étrangers pour financer leur expansion, figurent parmi les premières victimes de ce désengagement. Le ralentissement des investissements affecte aussi des secteurs comme l’industrie et les infrastructures technologiques, menaçant la modernisation et la compétitivité de l’économie française à moyen terme.
Perspectives : redresser l’attractivité de la France
Pour inverser la tendance, plusieurs axes d’action semblent possibles :
- Stabiliser le cadre législatif et politique : Les investisseurs appellent à une reprise des réformes structurelles, comme celles prévues par le projet de loi Industrie Verte II, afin de simplifier les démarches administratives et accélérer l’implantation de sites industriels.
- Renforcer la compétitivité fiscale : Maintenir les dispositifs attractifs, tels que le Crédit Impôt Recherche, tout en clarifiant la trajectoire budgétaire, est jugé essentiel pour redonner confiance aux investisseurs.
- Valoriser le potentiel européen : En collaborant avec ses partenaires européens, la France pourrait mieux répondre aux défis du protectionnisme américain et aligner ses politiques fiscales et industrielles pour attirer des capitaux internationaux.