Comment est née PowiDian Energy ?
J-E. B. : « Notre société a été fondée par des anciens de la branche télécom PMR d’Airbus Defence and Space qui faisaient face, en 2010, à une problématique très concrète : comment alimenter en électricité des systèmes et relais d’appels d’urgence dans des zones non-connectées au réseau électrique ? La question semble presque triviale en France métropolitaine, du fait du choix du nucléaire dans les années 60-70 qui permet le maillage quasi total et permanent du territoire. En revanche, nombre de zones, en outre-mer ou à l’étranger, doivent recourir au charbon ou au gaz ou diesel ; ou souffrent du caractère intermittent des énergies renouvelables. Confrontés à cette question, les fondateurs de notre entreprise se sont alors intéressés au potentiel de l’hydrogène et aux solutions que cette énergie pourrait apporter. Ils étaient d’ailleurs en cette occasion visionnaires, car la technologie était alors beaucoup moins avancée qu’elle ne l’est en 2024, et nous avons de ce fait mené depuis la création de PowiDian en 2013 un important travail de R&D pour aboutir à des solutions aujourd’hui matures et fiables qui sont opérationnelles chez nos clients. »
Quelles sont les solutions proposées par PowiDian Energy ?
J-E. B. : « PowiDian se positionne comme une entreprise leader des solutions liées à l’hydrogène stationnaire, c’est-à-dire hors mobilité et industrie lourde, cette dernière se focalisant sur la production d’hydrogène « matière première » en grande quantité, alors que nous sommes plus orientés vers le stockage d’énergie. Je précise que nous ne créons pas de l’énergie ex nihilo et que nos solutions restent power to power. Pour être en mesure de réaliser l’électrolyse produisant de l’hydrogène, nos électrolyseurs doivent être alimentés par une autre énergie, solaire, hydraulique ou éolienne. L’hydrogène possède néanmoins l’immense avantage de pouvoir être stockable sans limite de durée, restituant l’énergie produite et stockée lorsque le besoin s’en fait sentir et que les autres EnR ne sont plus disponibles. Notre solution permet donc d’alimenter en énergie des zones qui ne sont pas connectées au réseau électrique sans recourir aux groupes électrogènes, évitant ainsi à la fois la pollution liée à l’utilisation de diesel et les importants flux logistiques couteux nécessaires à leur alimentation. PowiDian répond parfaitement aux besoins des outre-mer – où le nucléaire n’est pas présent et dans lesquelles la saison des pluies rend les EnR non disponibles – ; mais aussi de nombre d’endroits à travers le monde. Par exemple, l’Allemagne et les Pays-Bas avaient jusqu’en 2022 massivement recours au gaz importé de Russie et ont été contraints de s’adapter à la suite du conflit en Ukraine, connaissant donc d’importantes difficultés. PowiDian alimente ainsi un hôpital à Rijnstate, à proximité d’Arnheim (dans ce cas, la déperdition d’énergie liée à la pile à combustible est d’ailleurs intégrée à un système de récupération de la chaleur, un modèle particulièrement vertueux). L’hydrogène et nos solutions, de production comme de stockage d’énergie, sont également plus pertinents que les batteries électriques traditionnelles dans des conditions climatiques extrêmes, notamment en altitude ou dans des zones polaires, comme le prouve l’installation de nos générateurs en Norvège ou à Tignes. Palliant un manque de linéarité dans la fourniture d’énergie, nos solutions peuvent connaître de multiples applications, comme pour l’alimentation de sites cruciaux (telle une base militaire française dans l’Océan Indien par exemple), ou encore la fourniture d’électricité aux navires de fort tonnage, paquebots ou cargos à quai dans les ports. Une autre application est de valoriser l’hydrogène ‘fatal’ disponible sur certains sites industriels et rejeté à l’air libre, pour en faire de l’énergie électrique permettant ainsi au client de diminuer sa facture d’électricité. »
Comment vos solutions peuvent-elles se déployer ?
J-E. B. : « Précisons d’abord que PowiDian est un intégrateur, sourçant et qualifiant les meilleurs composants, concevant et assemblant ses solutions avant de se charger de leur installation et de leur maintenance à distance grâce à notre connaissance native des problématiques de cybersécurité et réseau de communication. Nous sommes ainsi dépendants des aléas des délais d’approvisionnement des composants de nos solutions, et de fait il convient de compter parfois jusqu’à environ un an entre les premières études de faisabilité et l’installation. Du fait d’un marché encore restreint aujourd’hui, nous n’avons pas encore procédé au développement industriel de notre production, mais avons en revanche tout mis en place (méthodes, process, etc.) pour être en mesure de rapidement réaliser ce changement d’échelle et passer à une production industrielle de série lorsque cela sera possible. Plus concrètement, nous avons standardisé nos produits (même si des adaptations sont toujours réalisables le cas échéant), et avons introduit une part de modularité sous forme d’options : il est ainsi possible pour nos clients de déployer un système complet (générateur, électrolyseur, stockage, etc.), ou seulement l’un des éléments si d’autres sont déjà présents sur le site. D’une manière générale, il n’y a pas d’obstacle à l’installation de nos produits, la seule contrainte étant celle de l’espace : si nos solutions restent peu volumineuses, elles dépendent d’une source d’énergie primaire qui peut, elle, impliquer une forte surface au sol, et le foncier est dans certaines zones où nous intervenons un réel problème.
Vous avez évoqué un marché relativement restreint. Pour vous, quels sont aujourd’hui les freins à un déploiement plus massif de l’hydrogène ?
J-E. B. : « PowiDian a été pendant plusieurs années membre du bureau de France Hydrogène, ce qui nous apporte une vision globale des enjeux. Même si la technologie est en cours d’évolution, nous ne sommes encore qu’aux débuts d’une filière. L’un des principaux obstacles reste le prix : l’hydrogène reste encore cher à produire, et les megafactories, permettant une production plus importante et à bas carbone, ne font que répondre partiellement à cette problématique. Le véritable frein est que, aujourd’hui encore, le diesel reste meilleur marché que l’hydrogène. La subvention de l’hydrogène, certes importante, n’est somme toute qu’un pis-aller, et une plus forte taxation du diesel professionnel (au titre de la pollution de l’air qu’il entraîne par exemple), serait je pense bien plus efficace – et cohérente d’un point de vue environnemental – pour rendre l’hydrogène bas carbone plus attractif. Cela relève bien sûr de choix politiques tant au niveau national qu’Européen, qu’il ne m’appartient pas de décider ; mais une telle approche, plus pragmatique, permettrait de déployer plus largement l’hydrogène et ainsi participer à la réponse aux exigences de la transition énergétique. »
Plus d’infos : www.powidian.com