Tout commence chez Home Labs, startup fondée par Alexis Bidinot, professionnel passé par Atos avant de devenir directeur général délégué chez Free. C’est dans cette entreprise qu’il travaille sur le thème de la sécurité connectée, et s’aperçoit qu’un marché lui tend les bras.
Entrepreneur tu fus, entrepreneur tu seras
Le virus de la création d’entreprise est en Alexis Bidinot depuis… quasiment toujours. Les chiens ne font pas des chats, il grandit dans une famille d’entrepreneurs et, dès l’adolescence, il commence à créer des sites internet. Il n’imagine pas faire sa vie sans se lancer à son compte, ce qu’il fait à l’âge de 18 ans, sans sacrifier ses études pour autant. Esce, Essec, Centrale Paris, le CV est plus que solide. L’ingénieur en herbe travaille également avec l’un de ses meilleurs amis, Hugo Crauze, à la création d’une plateforme permettant aux entreprises de récupérer facilement les documents légaux de leurs fournisseurs qu’il est obligatoire de se procurer selon la loi. Leur prospection commerciale porte à la fois sur les fournisseurs et les donneurs d’ordre et l’affaire prend son envol. La société Actradis a d’ailleurs été rachetée il y a deux ans par un fonds d’investissement qui a l’intention d’en faire un acteur européen. Cependant, Alexis Bidinot quitte l’entreprise qu’il a cofondée trois ans après sa création dans l’intention de s’orienter vers une structure plus importante. À 24 ans, le voici qui débarque chez Atos, et bien lui en prend.
Le salariat a du bon
Dans le groupe, Alexis trouve des mentors qui lui permettent de gravir les échelons rapidement jusqu’à atteindre le Comex. En France, à l’étranger, il se dote d’une expérience différente jusqu’à ce qu’il décide de démissionner soudainement à 28 ans, une décision apparemment déraisonnable, mais il a son idée. Cette fois-ci, le voici reparti pour la création d’entreprise avec un associé, c’est décidé. Il rencontre un peu par hasard un certain Jean de la Rochebrochart et lui présente son idée. Ce dernier l’écoute et le rappelle quelques jours plus tard pour lui proposer un rendez-vous avec Xavier Niel. Ce dernier ne tarde pas à lui faire une proposition qui ne se refuse pas, il s’agit de travailler en direct avec lui.
Pas encore trentenaire, le voici directeur général délégué d’Iliad-Free, plongé au cœur des innovations lancées par le groupe. Lors du lancement de la Freebox Delta, Alexis Bidinot s’intéresse au travail de l’équipe dédiée à la maison connectée et la sécurité, un marché déjà bien développé aux États-Unis. Plus il étudie ce secteur, plus il se rend compte des formidables opportunités qu’il offre en France et en Europe. Il y a de la place pour un champion européen. Ni une ni deux, le voici qui quitte un statut de dirigeant plus que privilégié pour repartir sur le terrain de l’entrepreneuriat. Il ne le fera pas seul, une équipe de quelques ingénieurs de chez Free l’accompagne.
Tous se consacrent pendant environ deux ans au développement de l’offre proposée par Home Labs : ce sera Qiara. Dès son lancement en janvier 2023, les offres sont lancées et en quelques heures, les produits en précommandes sont en rupture de stock.
Les recettes Free à la sauce Qiara
La stratégie de Qiara est claire, il s’agit de bousculer un marché où la concurrence est historique et peu active. Disrupter un marché en proposant une offre à prix cassé pour des produits technologiques adaptés aux attentes de la clientèle. Voici qui rappelle les débuts de Free et de quelques autres entreprises…
Avec un kit d’appel à 99 euros alors que les prix se situent aujourd’hui entre 500 et 1000 euros, voici déjà qui interpelle. Quant à l’offre d’abonnements, avec ou sans télésurveillance, elle se situe systématiquement en-dessous de 30 euros. La révolution ne se situe pas que dans le prix. Finie l’installation de quatre heures par un professionnel, c’est le client lui-même qui installe son dispositif en moins de dix minutes. Le design a fait l’objet de tous les soins, le produit se doit d’être beau et le moins visible possible. Une réussite, l’équipement développé par l’équipe a remporté deux prix de design internationaux.
Nec plus ultra le produit est fabriqué en France, à Laval, sauf l’optique de la caméra qui ne peut pas l’être et est importée de Taïwan. Les préoccupations des clients ont été prises en compte, notamment le besoin de confidentialité. Cela a mené à la mise en place d’un obturateur qui se ferme automatiquement lorsque le client est chez lui, bloquant le son et la vidéo. Ces mêmes vidéos sont stockées en local ce qui compliquerait fortement un piratage, les données sont chiffrées, et hébergées -hors vidéos- chez Scaleway (Iliad).
Le pari de Xavier Niel
La discrétion a été de mise dans les débuts, mais il semble clair que le projet Qiara dispose du soutien de Xavier Niel, l’homme d’affaires at ypique toujours à l’affût des bonnes personnes dont il sent qu’elles ont la fibre entrepreneuriale. Le voile a été levé, car même si l’on savait que l’homme d’affaires soutenait l’initiative de son ancien directeur général délégué, cela a été confirmé par la levée de 14 millions d’euros à laquelle Iliad et Xavier Niel ont participé. Les détails du deal restent cependant secrets. Le projet porté par Alexis Bidinot est quant à lui on ne peut plus clair, la disruption de ce marché de la sécurité doit permettre de créer une grande entreprise française, ce qui semble tout à fait envisageable. En effet, seuls 10% des foyers français sont à ce jour équipés d’alarmes, le potentiel est donc énorme.
Les inquiétudes du leader suédois Verisure et de Homiris
D’autant que le champ est large, non seulement l’offre de Home Labs peut s’étendre géographiquement, mais aussi dans la largeur de l’offre. La sécurité d’une maison connectée, c’est aussi être averti des fuites d’eau, d’une consommation d’électricité anormale sans que d’autres structures ne vous en avertissent souvent avec retard. La sécurité de la maison s’entend au sens le plus large pour le futur de Qiara. C’est Alexis Bidinot qui le dit : « Notre ambition est de devenir le leader français et européen de la maison connectée avec une suite d’objets et de services innovants, souverains et made in France ». Et en plus, Qiara casse les prix, un peu comme l’avait fait Free sur le marché des télécoms.
Anne Florin
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