La crise sanitaire du Covid-19 a entrainé de nombreux bouleversements sur le marché du travail. Bien des salariés ont ainsi quitté leurs emplois, à tel point que certains ont pu évoquer une «Grande Démission». Cependant, si ces évolutions sont réelles, il convient surtout de s’interroger sur leurs causes et leurs conséquences pour les entreprises. Pour en savoir davantage, entretien avec Denis Bournerias, fondateur du cabinet de recrutement éponyme spécialisé dans un secteur en tension, celui de l’hôtellerie.
Pouvez-vous nous présenter votre cabinet et votre expertise, en quelques mots ?
Le cabinet Denis Bournerias est spécialiste du recrutement pour des postes de cadres dans l’hôtellerie, la restauration et le retail haut de gamme. Ce sont des environnements avec de vraies spécificités, même si notre métier reste fondamentalement celui du recrutement. Nous accompagnons les entre-prises de ces secteurs dans la recherche de leurs futurs collaborateurs, mais nous sommes aussi un cabinet qui aide les services RH de nos clients pour la gestion de leurs talents internes, à travers une offre d’outplacement. J’ai personnellement une expérience de plus de vingt ans dans mon métier et dans le monde de l’hôtellerie.
Quel regard portez-vous sur le marché de l’emploi aujourd’hui ?
Il y a effectivement eu, dans l’hôtellerie mais sur le marché de l’emploi au global, de vraies évolutions. Nous pouvons le voir, même sur certains postes spécifiques que nous avons à traiter, comme chef de cuisine qui nécessite une expertise métier, mais également pour d’autres plus transversaux, je pense par exemple aux métiers du marketing ou des RH.
Ces cadres ont souhaité s’ouvrir vers d’autres secteurs d’activité ou pour réaliser un projet personnel. Dans l’hôtellerie, beaucoup sont partis vers l’immobilier, la distribution, dans le coaching ou l’entreprenariat. Même s’ils reviendront pour certains à leur premier métier, cette démarche est enrichissante et ils seront porteurs d’une autre philosophie. Je pense que le Covid a plus été un catalyseur qu’une cause profonde, les évolutions étaient déjà là. Les candidats ne sont plus à la recherche d’un salaire, ils veulent pouvoir s’identifier à leurs entreprises, qu’elles portent des valeurs managériales et humanistes.
Il y a aussi une vraie exigence de préservation de l’équilibre de vie personnelle. Par exemple, le droit à la déconnexion, aujourd’hui incontournable.
Comment les entreprises s’adaptent-elles à ces évolutions ?
En fait, je retire de cette séquence de la pandémie l’impression de changements positifs dans les manières d’agir, aussi bien pour les entreprises que pour les candidats. Il y a d’abord une véritable prise en compte des questions de valeurs, on le voit notamment à travers l’importance prise par les questions de RSE dans les entreprises aujourd’hui. Cependant, au-delà de ça, il y a un vrai changement de paradigme dans les processus de recrutement.
Cela passe par la compréhension d’un besoin des candidats à vouloir préserver une évolution professionnelle et vie privée. Dans un contexte de pénurie relative des profils les plus qualifiés, les entreprises de l’hôtellerie ont pris la mesure du changement et sont prêtes à s’investir de différentes façons soit en proposant des logements de fonction, hausse de salaires, télétravail, actionnariat, plan d’évolution défini à l’embauche etc… pour convaincre les meilleurs candidats.