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Retrouvons l’ambition d’une « France de propriétaires » !


Par Guillaume Cairou, président de la Chambre de Commerce et d’Industrie des Yvelines, Christophe Bouguin, président de la Fédération  des Entrepreneurs du Bâtiment des Yvelines et Michel Platero, ancien président de la FNAIM Grand Paris. Les conclusions du Conseil National de la Refondation ont fortement déçu les acteurs de l’immobilier...

Entreprendre - Retrouvons l’ambition d’une « France de propriétaires » !

Par Guillaume Cairou, président de la Chambre de Commerce et d’Industrie des Yvelines, Christophe Bouguin, président de la Fédération  des Entrepreneurs du Bâtiment des Yvelines et Michel Platero, ancien président de la FNAIM Grand Paris.

Les conclusions du Conseil National de la Refondation ont fortement déçu les acteurs de l’immobilier et du logement. Les réponses à venir de l’Exécutif devront rectifier le tir si ce dernier veut résorber la crise actuelle.

La synthèse du Conseil National de la Refondation effectuée, l’Élysée souhaite désormais l’adoption rapide d’une loi visant à enrayer la crise du logement[1]. Mais si l’urgence à agir est indiscutable, l’ampleur du problème appelle des mesures plus fortes que celles résultant des travaux du CNR. Tous les acteurs conviés aux discussions le répètent inlassablement depuis des mois. Dernièrement, les parlementaires eux-mêmes ont tenté de faire revenir Bercy sur ses arbitrages budgétaires pour 2024, pour beaucoup défavorables à une sortie de crise, avec notamment la suppression du dispositif Pinel[2] et le recentrage du prêt à taux zéro. Malgré ces nombreuses prises de position, l’Exécutif oppose l’argument d’une baisse nécessaire des dépenses publiques. Il nous faudra pourtant un regain d’intervention de l’État pour résoudre une crise multiforme et auto-alimentée, dont les effets dépassent le seul secteur de l’immobilier.

Les dernières données à disposition démontrent en effet que les enjeux ne doivent pas être sous-estimés. Nous faisons face à une baisse de 50 % du nombre de crédits immobiliers accordés dans le neuf sur un an, comme en témoigne la Fédération Française du Bâtiment[3]. L’impact économique et social est nettement perceptible : rien que parmi les moins de 35 ans, soit l’avenir de notre pays, 12 % renoncent à une formation et 14 % à un emploi faute d’un logement disponible dans un périmètre acceptable[4]. Le logement social n’est pas mieux loti et peine à satisfaire les 2,4 millions de demandes existantes, un record[5]. L’État a voulu démontrer qu’il comprenait la gravité de la situation en créant une formation Logement au sein du CNR. Il doit maintenant prouver qu’il entend pleinement se saisir de ce sujet brûlant, en se dotant à nouveau d’une véritable politique du logement de long terme et coconstruite avec les acteurs et experts du secteur, pour créer un appel d’air salutaire.

Retrouvons l’ambition d’une « France de propriétaires »

Il est un symbole qui ne trompe pas : sur les trente dernières années, les ministres du Logement ayant occupé ce poste plus de deux ans se comptent sur les doigts d’une main. La politique du logement mérite au contraire de la constance, une vision et un projet clairs. Le ministère du Logement ne peut plus être un simple marchepied, une porte d’entrée au Gouvernement en espérant une nomination à un ministère considéré plus prestigieux. L’État doit aussi faire davantage confiance aux professionnels, les premiers à connaître le terrain, alors que leurs propositions risquent, à ce stade, de ne pas se retrouver dans la future loi. Pensons par exemple à la nécessaire suspension de l’interdiction des logements classés E, F et G sur le marché locatif, au moment même où les demandes de location explosent. En contrepartie, appliquons l’idée de Banque de la rénovation pour faciliter et accélérer les travaux de rénovation énergétique de ces derniers.

La résolution de cette crise constitue enfin une opportunité de se poser une question de fond : veut-on encore de la « France de propriétaires », vantée encore il y a peu ? L’Insee a recensé 57,4 % de propriétaires de leur logement en 2022[6], contre 70 % en moyenne en Europe. Nombre d’entre eux diront que l’État est manifestement contre les propriétaires, par l’accumulation d’obligations administratives et fiscales au fil des ans. Or, la France des propriétaires n’est-elle pas le corollaire de celle des entrepreneurs ? A l’heure du retour en force de l’indépendance et de la souveraineté, au nom de quoi devrait-on interdire à de nombreux citoyens la possession de leur domicile ? L’élaboration de la loi sur le logement devra se poser cette question, par honnêteté envers tout un secteur économique, et envers les citoyens en général. C’est aussi en s’emparant de ce sujet de société que nous verrons si l’État a entendu le désir d’autonomie des Français.


[1]    https://www.aefinfo.fr/depeche/698810-les-travaux-du-cnr-logement-nourriront-un-projet-de-loi-qui-sera-presente-tres-prochainement-elysee

[2]    https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/biens-d-equipement-btp-immobilier/budget-2024-les-parlementaires-interpellent-le-gouvernement-sur-la-crise-du-logement-975212.html

[3]    https://www.ffbatiment.fr/actualites-batiment/actualite/tendancesbatseptembre2023

[4]    https://www.europe1.fr/economie/exclu-europe-immobilier-le-parcours-du-combattant-des-jeunes-pour-se-loger-4194448

[5]    https://www.union-habitat.org/cnr-logement-le-mouvement-hlm-deplore-un-rendez-vous-manque

[6]    https://www.insee.fr/fr/outil-interactif/5367857/details/40_SOC/43_LOG/43C_Figure3

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