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« Quand on entreprend, il faut être prêt à travailler beaucoup et à dépasser ses peurs »


Renoncer au salariat pour se lancer dans l’entrepreneuriat n’est pas chose aisée. Le jeu en vaut-il toujours la chandelle ? Quels sont les pièges à éviter ? Entrepreneur dans le digital et auteur de l’ouvrage "Quitter le salariat, travailler en liberté", Stéphane Truphème nous détaille sa méthode pour réussir en tant que freelance, solopreneur ou travailleur indépendant.

Entreprendre - « Quand on entreprend, il faut être prêt à travailler beaucoup et à dépasser ses peurs »

Quels sont les principaux défis à relever lorsqu’on passe du salariat à l’entrepreneuriat ?
Stéphane Truphème : Le salariat nous conditionne à un certain mode de pensée et de travail. On nous demande souvent d’être « dans la moyenne » plutôt que d’être excellents. L’entrepreneuriat exige une approche différente, où la créativité, l’adaptabilité et l’apprentissage continu sont essentiels.

Se lancer est-il plus difficile aujourd’hui ?
Les conditions de l’entrepreneuriat ont totalement changé avec le digital. Les barrières à l’entrée ont quasiment disparu. En corollaire, la concurrence est acharnée. Des méthodologies précises et des notions, telles que le personal branding, le contenu et le copywriting, sont désormais nécessaires pour réussir.

Certains hésitent, et renoncent parfois, à quitter le salariat. Comment surmonter l’angoisse du saut dans l’inconnu ?
Quitter le salariat n’est pas si risqué, surtout en France où les allocations chômage sont généreuses. Elles nous laissent le temps de tester notre idée sur le marché. Il est également possible de développer une activité complémentaire à son salariat, un « side business », pour prendre de l’assurance sur son projet et quitter le salariat en douceur. De plus en plus de solopreneurs choisissent cette solution. Certains trouvent leur équilibre en combinant leur salariat et leur projet personnel.

Dans votre livre, vous évoquez le concept de « rémunération magique » que doit atteindre un freelance ou un solopreneur. De quoi s’agit-il ?
La « rémunération magique » correspond au revenu minimal pour vivre. Pour obtenir ce chiffre, il faut faire la somme de ses charges incompressibles : loyer, alimentation, scolarité des enfants, vacances… Cela définit le revenu minimum nécessaire pour vivre de son activité.

À quelles questions fondamentales doit répondre un solopreneur qui vient de démarrer ?
Il faut au minimum répondre à quatre questions : qui ? quoi ? pourquoi ? comment ? D’abord, à qui souhaitez-vous vendre vos offres ? C’est votre cible, elle doit être la plus nichée et précise possible. Ensuite, que vendez-vous ? C’est votre offre. Comment la positionner ? Pourquoi vos clients l’achèteraient-ils ? Puis vient le pourquoi, votre « why ». Pour durer, vos offres doivent être alignées avec vos aspirations, vos valeurs, vos convictions. Enfin, le comment : comment délivrez-vous votre offre ? Ce sont tous ces éléments qui peuvent vous différencier de vos concurrents. Votre personnalité entre dans l’équation.

Le succès entrepreneurial dépend-il uniquement de compétences techniques ?
Non. Il est crucial de développer des compétences marketing, commerciales et de gestion. En se concentrant sur la création de valeur pour les clients, la résolution de problèmes et l’adaptation constante au marché, on maximise ses chances de réussite.

Quelles erreurs communes commettent ceux qui quittent le salariat ?
La première erreur est de se lancer par défaut. Ne trouvant pas d’emploi, je tente ma chance en freelance : c’est le meilleur moyen de se planter. La seconde erreur consiste à trop intellectualiser les choses. La troisième est d’attendre que tout soit parfait. L’action doit primer sur la réflexion.

Vous soutenez que le tarif journalier moyen est un piège pour les freelances. Pourquoi ?
Le taux journalier moyen nous enferme dans une concurrence féroce sur les prix et surtout dans une subordination vis-à-vis des clients. Il vaut mieux trouver sa valeur et baser ses prix sur cette dernière. Si on offre beaucoup de valeur à ses clients, le prix n’est plus un problème. Son offre devient irrésistible.

Un solopreneur doit-il forcément se spécialiser ?
Il faut déterminer un segment de marché spécifique auquel on souhaite s’adresser. Il ne faut pas avoir peur de choisir un petit segment, car il est plus facile de se démarquer sur un marché restreint. Un bon moyen d’y arriver est de définir son client idéal et d’identifier le problème principal que votre offre lui permet de résoudre. Une petite astuce consiste à raconter l’histoire de ce client idéal. En se mettant dans ses baskets, vous pouvez imaginer son parcours. Quels sont les défis qu’il rencontre ? Comment recherche-t-il des solutions et pourquoi la vôtre est-elle la plus adaptée ? Décrivez l’état idéal qu’il atteindra grâce à votre offre, et formalisez ensuite votre offre.

Comment bâtir une offre convaincante ?
En s’assurant qu’elle réponde à certains critères. Elle doit d’abord résoudre un problème : votre offre doit apporter une solution concrète à un problème que rencontrent vos clients potentiels. Elle doit être unique et différenciée. Démarquez-vous de la concurrence en proposant une offre spécifique et en mettant en avant vos avantages uniques.

Elle doit aussi être irrésistible : votre offre doit être tellement convaincante que vos clients potentiels auront du mal à y résister. Mettez en avant les bénéfices, la transformation et les résultats qu’elle procure. Enfin, assurez-vous qu’elle soit crédible. L’entrepreneur doit s’appuyer sur son expertise, ses résultats et des preuves sociales pour démontrer sa valeur et instaurer la confiance.

Selon vous, l’agilité est un accélérateur de la réussite de l’entrepreneur. Comment la développer ?
C’est un mindset. Il faut se concentrer sur le cheminement plutôt que sur l’objectif final. Au lieu de dire « cette année, je veux gagner 300 000 euros », posez-vous la question « comment gagner 300 000 euros ? » C’est en se concentrant sur les processus que l’on devient agile.

Quel rôle joue le réseau dans le succès d’un solopreneur ?
Il est essentiel de ne pas rester seul. Le solopreneur doit se connecter à des personnes intéressantes sur LinkedIn, interagir avec elles et les inviter pour un café, par exemple. Prenez au moins deux ou trois rendez-vous hebdomadaires. La présence sur les réseaux sociaux est importante. En échangeant avec des pairs, des partenaires et des clients potentiels, on génère souvent des opportunités insoupçonnées qui ont un impact dans la « vraie vie ». Les réseaux sociaux représentent aujourd’hui le meilleur moyen de se connecter à son marché sans barrière de temps et d’espace. C’est une opportunité phénoménale à la portée de toutes et de tous.

Tous les salariés ont-ils l’âme d’un entrepreneur ?
Il n’y a pas de profil type pour entreprendre. Toutefois, il faut être prêt à travailler beaucoup, à dépasser ses peurs et à faire des choses que l’on n’apprécie pas forcément, comme la vente ou se montrer sur les réseaux sociaux.

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