Dès le départ à Strasbourg, le ton est donné : accueil chaleureux, équipage souriant, bateau à dimension humaine, le MS Lafayette de l’entreprise française CroisiEurope accueille 82 passagers dans 43 cabines doubles ou individuelles, disposées sur deux ponts.
Confort discret et feutré des lieux de restauration (excellente) et de réception. Tout est en place pour une balade de cinq jours sur le « Rhin romantique », qui inspira tant d’auteurs et d’artistes. Un périple surprenant qui vous mènera jusqu’à Coblence, à la confluence de la Moselle et du Rhin, et à Rüdesheim, une charmante petite cité, renommée pour son vignoble et ses guinguettes.
Pentes abruptes, vallées escarpées, rochers étranges et châteaux enchanteurs, le paysage rhénan est, dès la fin du XVIIIe siècle, au cœur de l’inspiration du jeune mouvement romantique. Goethe, écrivain et naturaliste, vantait déjà la beauté du fleuve. Dès le milieu du siècle suivant, les premiers touristes montent sur les tout récents bateaux à vapeur qui sillonnent le fleuve. L’un des premiers fut Lord Byron, le grand poète anglais dont les récits de voyage popularisèrent le Rhin auprès de ses compatriotes. D’autres auteurs comme Clemens Brentano ou Heinrich Heine furent aussi captivés par sa magie.
La Lorelei, figure mythique de l’imaginaire rhénan
Si beau qu’il soit, le fleuve est pourtant souvent dangereux. La raison principale en est sans nul doute la présence de nombreux bancs de sable qui rendent sa navigation difficile. On doit d’ailleurs à cette dangerosité la plus célèbre de toutes les légendes rhénanes, celle de la Lorelei. C’est dans une zone étroite du Rhin, près de Saint Goarshausen, où les falaises escarpées surplombent des eaux souvent tumultueuses et où périrent de nombreux bateaux, qu’est né le conte de la sirène blonde qui, depuis le sommet du roc, attire les marins.
Si d’un point de vue géographique, Lorelei est le patronyme d’un rocher haut de cent trente-deux mètres, c’est aussi, dans la mythologie germanique, celui d’une nixe, l’équivalent des nymphes grecques. Le fils d’un comte voisin, intrigué par ce qu’on lui disait de la beauté de la jeune femme et la splendeur de sa voix, tenta de s’approcher d’elle et, fasciné par son chant, se noya dans les eaux sombres.
Apprenant qu’elle était responsable de la mort de son héritier, le comte décida de châtier la coupable, mais la Lorelei appela à son aide son père le Rhin, qui envoya une vague pour l’arracher aux griffes de ses agresseurs. Son chant s’élève toutefois toujours les nuits de tempête près du rocher.
La magie des châteaux
La beauté de cette balade de cinq jours sur les eaux d’un des plus impressionnants fleuves d’Europe tient aussi à la splendeur des châteaux d’une densité et d’une variété uniques, dont la présence s’étire sur près de 120 km. Depuis Bingen et Rüdesheim au sud, jusqu’aux collines des Siebengebirge au nord, il en existe plus de 60. Demeures médiévales, élégants palais baroques ou forteresses impressionnantes créent ainsi un paysage architectural unique en son genre.
Coblence et Rüdescheim
À la confluence du Rhin et de la Moselle, le célèbre « Deutsches Eck », Coblence est l’une des plus belles et anciennes villes d’Allemagne. Résidence de l’archevêque-électeur de Trèves, la ville servit de quartier général aux « émigrés » pendant la Révolution française. Ici, se marient avec bonheur un certain mode de vie « à la française » et la tradition allemande : caves à vin, ruelles étroites, petits coins romantiques et convivialité. Quatre collines, des vignobles et des bois entourent la cité.
Dans la cour de l’hôtel de ville, la fontaine « Schängelbrunnen », emblème de Coblence, vaut le détour. À ne pas manquer, le téléphérique qui vous transportera depuis la basilique Saint-Castor jusqu’à la forteresse d’Ehrenbreitstein, bastion romain, puis château médiéval, témoin de nombreuses batailles.
Heidelberg
Dernière étape, Heidelberg, sa mythique université, la plus ancienne d’Allemagne, fondée en 1386 par Ruprecht Ier du Palatinat, et son château qui vit naître la fameuse « Princesse Palatine », épouse de Monsieur, frère de Louis XIV, et probablement la plus drôle et la plus audacieuse des mémorialistes du Grand Siècle. Sa correspondance est un vrai bijou d’ironie et de mordant.
Si le château est à présent en ruine, le Grand Tonneau est l’une de ses principales attractions. Il fut installé dans le sous-sol du bâtiment par Johann Kasimir, oncle et tuteur du futur Frédéric IV, afin de contenir les 130 000 litres de vin collectés pour la dîme du Palatinat. Dans le Hall Royal attenant, les électeurs palatins célébraient des fêtes somptueuses.
À l’issue de ces cinq journées bien remplies, le retour à Strasbourg se fait à regret, mais cette équipée à bord ne restera pas longtemps sans suite. Nul doute que vous ne tarderez pas à réembarquer : CroisiEurope, c’est plus de 170 destinations et pas qu’en Europe ! À moins que vous n’en profitiez pour visiter notre magnifique Alsace.
Françoise Lebraz