Le rennais Louis Le Duff signe l’un des plus beaux parcours de self-made-man avec Brioche Dorée ou Del Arte. Son groupe créé en 1976 s’impose comme un géant mondial, qui vise les 3 Mds€ de CA d’ici 2018.
Louis Le Duff et le lobby breton
Capable de faire des discours en Breton, Louis Le Duff est très attaché à sa région. Il fait partie du Club des Trente, une structure informelle qui réunit des chefs d’entreprises de la région comme Jean-Jacques Hénaff (le célèbre pâté), Roland Beaumanoir (enseignes Cachecache ou Morgan) et Daniel Roullier (engrais et nutriments pour animaux).
Il est également un membre actif de l’Institut de Locarn, un think tank régional installé dans le premier village numérique en France et oeuvrant pour le développement économique et culturel de la Bretagne, et le parrain de l’école Diwan à Paris.
Louis Le Duff, roi de la franchise
Le succès du groupe repose principalement sur le développement de ses enseignes en franchise. Ce modèle permet de maintenir un rythme impressionnant d’ouvertures (le groupe compte aujourd’hui près de 1.700 restaurants et boulangeries sur les 5 continents), en minimisant les risques et les investissements.
Convaincu par la pertinence de ce modèle, Louis Le Duff finira en 2004 son doctorat en sciences de gestion, avec comme sujet de thèse «Les effets de levier de la franchise», un travail qu’il avait commencé… dans les années 1980 ! Louis Le Duff a également publié un livre best-seller pour défendre ses convictions sur le sujet.
Louis Le Duff, self-made-man dans l’âme
Dans sa première vie professionnelle, Louis Le Duff était enseignant à Sup de Co Rouen. Pour compléter son salaire, il crée en 1974 une société de commerce de tickets restaurants, Brest Restaurel, qui lui permet de financer son premier restaurant. Convaincu de l’importance des entrepreneurs dans l’économie, il a édité un guide, «Entreprendre et Réussir – Enfin Patron», coécrit par Hervé Novelli, ancien Secrétaire d’état des PME, avec l’objectif «d’aider la création d’entreprise et transmettre aux jeunes mon expérience d’entrepreneur». Louis est également très lié à l’ancien ministre Pierre Méhaignerie.
Louis Le Duff, un homme discret
Avec une fortune estimée à 1,4 Mds€, la famille Le Duff pointe à la 48ème place française. Pourtant, on sait peu de choses sur le patron rennais, grand sportif devant l’Éternel (100 km à vélo chaque semaine). Modeste, mais surtout discret : «En ces temps de crise, je ne veux pas apparaître comme l’homme qui réussit alors que tant de patrons sont dans la difficulté».
Et surtout attaché à ses racines. Louis Le Duff cite ainsi souvent sa grand-mère bretonne «qui parlait à peine français» et lui répétait que «on ne doit pas dépenser plus qu’on ne gagne». Une règle de base qui a permis à l’entrepreneur de conserver la totalité de son capital.
Louis Le Duff, leader en 40 ans
Aujourd’hui, le groupe Le Duff est leader de la restauration rapide, avec 1,5 Mds€ de CA. Difficile d’imaginer que tout a commencé modestement. En 1976, ce fils de maraîchers du Finistère ouvre sa première boutique à Brest, avec l’équivalent de 1.500 €.
Après avoir découvert la restauration rapide au Canada où il a fait son MBA, il a eu l’idée d’adapter le concept en France en proposant non des hamburgers, mais des viennoiseries et des sandwichs. Un véritable coup de génie ! En moins de 4 ans, il ouvrira 6 nouvelles succursales. Aujourd’hui, les 500 restaurants servent plus de 300.000 clients… chaque jour !
À Rennes son siège social à 25 M€
Le groupe de restauration va enfin, avec plus de deux ans de retard, ouvrir son nouveau siège social à Rennes, dans un immeuble de bureaux de 10.000 m. sur 8 étages, à proximité du centre commercial Alma, qui héberge plusieurs enseignes du groupe (Pizza Del Arte, Brueggers, Le fournil de Pierre, Brioche Dorée…).
Cet investissement, environ 25 M€, permettra de rapatrier divers services en Bretagne et d’ouvrir un centre de formation multimédia, baptisé la Breizh Academy, accessible aux 28.000 salariés dans le monde. Un soulagement pour la région, Louis Le Duff ayant menacé de partir si l’aéroport nantais de Notre- Dame des Landes ne voyait pas le jour !
Hédiard, un coup pour rien
En 2014, Louis Le Duff est l’un des candidats à la reprise de l’épicier haut-de-gamme Hédiard (17 M€ _de CA), à l’époque propriété de l’investisseur russe Sergueï Pougatchev (repreneur de France Soir).
Bien qu’il bénéficie du soutien de Jean-Paul Barat, l’ancien dirigeant d’Hédiard évincé par ses nouveaux propriétaires, Louis Le Duff ne parvient pas à mettre la main sur ce joyau du luxe, qui est finalement racheté par un groupe autrichien de restauration et d’hôtellerie, Do & Co, dont l’un des actionnaires est l’ancien pilote automobile Niki Lauda.
Grand-mère et les sushis
Quand on lui demande si les asiatiques vont adopter les pains et viennoiseries à la française, Louis Le Duff répond d’une boutade : «Votre grand-mère mangeait-elle des sushis ? Non ?
Et bien au Japon ou en Chine c’est pareil, ils ne mangeaient pas de croissants et, grâce à nous, ils le font». L’Asie représente en tout cas un axe majeur de développement pour le groupe qui, après la Corée du Nord, va implanter une centaine de restaurants Brioche Dorée au Japon d’ici 2020, et jusqu’à 500 dans le futur, grâce à un accord avec le géant nippon de l’agroalimentaire Suntory (25 Mds€ de CA).
Vincent le Duff, au nom du père
Vincent le Duff, fils de Louis, assure la direction générale de Bruegger’s, qui compte déjà 4 établissements en France, 6 ouvertures prévues au 1er semestre 2016. Son frère Philippe a imaginé le concept de la Ferme des Loges, qui réalise des plats cuisinés bio et haut-de-gamme, sans parler de ses nouvelles crêperies.
Mais, à 70 ans en août prochain, le patriarche ne semble pas du tout décidé à passer la main, affirmant : «Avant, dans l’industrie, on pouvait tenir 3 générations. Maintenant, tu disparais si tu n’es pas à la hauteur». Une sacrée pression sur ses deux fils.
Louis Le Duff, un industriel Made in France
Si ce sont les enseignes qui ont fait la réputation du groupe, Louis Le Duff est aussi un véritable industriel.
Les produits de boulangerie et de viennoiserie sont en effet fabriqués dans les usines Bridor, qui fournissent également les plus belles enseignes de l’hôtellerie et de la restauration, comme la Maison Lenôtre mais aussi Disneyland Paris, l’Eurostar et plusieurs compagnies aériennes. Outre le site historique en Bretagne, Bridor possède 9 usines dans le monde, dont 3 au Canada et 1 aux États-Unis.