Ces dernières années, le marché de la voiture électrique a fait l’objet d’une croissance explosive comme en témoigne le succès d’entreprises comme Tesla qui enchaîne les records de vente, malgré les défis présentés par la nouveauté relative du secteur. Fin 2017, le constructeur passait même en tête des ventes en Norvège avec sa Tesla Model 3.
Ces développements ont pour conséquence naturelle d’entraîner une reconsidération globale de notre relation au pétrole, à l’essence et au diesel ainsi qu’aux combustibles fossiles en général, comme sources d’énergie. Pour les investisseurs et entrepreneurs que cette révolution énergétique intéresse, la question reste de savoir quel est l’impact quantifiable de ces développements sur le prix du pétrole et la demande en barils par rapport à la consommation effective.
Dans un rapport de 2017 sur l’évolution du marché pétrolier dans les cinq années à venir, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) estimait que la croissance du parc mondial des véhicules électriques ne réduirait la consommation de pétrole que de 0,2 % d’ici à 2022. La raison de cet impact mineur : une hausse de la demande en pétrole dans les pays émergents où l’on prévoit que l’augmentation du pouvoir d’achat des classes moyennes portera essentiellement sur l’achat de véhicules à essence. De fait, si l’Opep s’attend à un plafonnement de la consommation de barils par jour à horizon 2035, d’ici là, elle estime que ce nombre passera de 97 millions environ à 190 millions.
L’importance de ces prévisions tient en partie à l’aspect géopolitique du prix du pétrole. Comme le souligne le FMI, seule une partie (entre la moitié et le tiers) de la récente baisse du cours du pétrole est à imputer à une baisse de la demande, le reste étant dû à un accroissement de la production, à la fois de la part de l’OPEC et de l’Iran. Or, l’incidence des variations dans l’offre et la demande en pétrole n’affecte pas seulement le cours de la matière première en bourse, mais touche également presque tous les instruments financiers pouvant être tradés en ligne.
Voilà pourquoi l’impact de la croissance du secteur des véhicules électriques sur le cours du pétrole revêt une importance significative pour quiconque souhaitant investir en bourse. Si l’on en croit le scénario selon lequel cet impact sera moindre, alors l’épuisement progressif de la réserve pétrolière pourrait entraîner des perturbations majeures à mesure que le prix du pétrole augmente, en raison de la concurrence entre les différents secteurs de consommation pétrolière (transport individuel, de marchandises, ferroviaire, maritime ou encore aérien. Résultat, une dépression serait alors probable entre 2025 et 2035.
Toutefois, la société pétrolière anglaise BP rejoint le point de vue de l’Opep en estimant que la part de la consommation pétrolière mondiale par le secteur automobile restera pratiquement inchangée en 2040 en raison de la multiplication par deux de la demande mondiale en pétrole pour la consommation automobile.
Avant que l’automobile électrique n’impacte sensiblement le cours du pétrole, il faudrait donc voir à la fois une démocratisation de l’accessibilité au marché du véhicule électrique, une amélioration de la durée de vie des batteries et de l’accès aux points de rechargement dans les pays développés, et une intégration similaire dans les pays actuellement en voie de développement. Or, si on en croit les divers scénarios étudiés par les acteurs du pétrole mondiaux, même avec une croissance rapide du marché de la voiture électrique, nous ne sommes pas prêts de voir le prix du pétrole, ou la demande en barils, chuter en raison d’une substitution de l’énergie électrique au pétrole.