Gilles Attaf, grand défenseur du made in France, président d’Origine France Garantie et des Forces Françaises de l’Industrie, le rappelle à juste titre dans Les Échos : « Sur une feuille de paie de 3 900 € nets perçus par un salarié, l’entreprise aura déboursé 8 500 €. Ce qui signifie qu’après cotisations sociales et fiscales, le salarié ne perçoit que 46 % de ce que l’entreprise aura déboursé. » Il ne reste plus grand-chose ! Difficile dans ces conditions, même avec un salaire plus que correct, d’envisager de se constituer rapidement un patrimoine élevé tout en restant salarié. D’où l’intérêt, au passage, de favoriser au maximum les formules de participation et les stock-options.
La voie royale, cela commence à se savoir, est de prendre des risques et d’investir dans sa propre entreprise. On ne gagne pas certes à tous les coups. Et la présidente du mouvement Croissance Plus, Audrey Louail, dirigeante d’Ecritel (infogérance et hébergement Cloud avec 34 M€ de CA), n’a pas tort de rappeler, dans son livre Idées reçues sur les entrepreneurs (éditions Le Cavalier bleu), que : « Les patrons ne sont pas, dans la majeure partie des cas, de riches privilégiés, et que ceux qui réussissent ont dû prendre de gros risques… ». La majeure partie des patrons français gagnent moins de 4 000 € mensuels et on ne parle pas de tous ceux qui ont perdu leur entreprise ou ont été obligés de tout liquider.
Il est vrai aussi que plus de la moitié des 20 plus grosses fortunes françaises est constituée de créateurs d’entreprises de première génération. Une très belle proportion d’entrepreneurs, et il est donc faux de prétendre que l’ascenseur social ne fonctionne plus du point de vue entrepreneurial dans notre pays.
Sur ce plan, on ne peut que se réjouir de voir l’une de nos plus belles réussites françaises actuelles, en l’occurrence Xavier Niel, monter au créneau et prendre son bâton de pèlerin afin de monter à l’abordage des conformismes et autres frilosités hexagonales pour inciter les courageux à tenter leur chance. Fidèle au message et au prosélytisme d’un certain Bernard Tapie, le fondateur de Free impulse à sa manière, et avec un style moins voyant, une dynamique tout aussi efficace. Faut-il rappeler la création des incubateurs Station F, de l’école Hectar, ses investissements dans de nombreuses jeunes pousses, et son accompagnement auprès de self-made men audacieux. Le créateur de Lunettes pour Tous, Paul Morlet, raconte qu’il avait abordé Niel au culot dans un salon pour le convaincre d’investir à ses côtés. Et cela a marché !
Visiblement, le patron d’Iliad prend goût à ce nouveau job de dynamiseur global. L’homme d’affaires publiera d’ici fin septembre sa première autobiographie, Entretiens XN, livre d’entretiens et de conseils coécrit avec Jean-Louis Missika. Sans même parler de son show Comment devenir milliardaire ? où il interviendra seul sur scène le 18 septembre prochain à l’Olympia. Comme il le fait également avec tant de brio chaque année au Salon BIG Bpifrance (prochainement le 10 octobre 2024 à l’Accor Arena de Paris).
Rassurant, à la suite du succès d’émissions télé telles que Qui veut être mon associé ? sur M6, de voir certains capitaines d’industrie les plus performants (Marc Simoncini, Tony Parker, Éric Larchevêque, Antony Bourbon, ou Jean-Pierre Nadir et Kelly Massol) ne pas hésiter à monter au créneau afin de rameuter talents et énergies. Dans un pays où l’on entend que trop tous ceux qui récriminent ou réclament, ce bol d’air frais ne peut que relancer la mécanique. Répétons-le : oui, on peut réussir en France en 2024 sans argent, sans diplôme et sans réseaux. Même si c’est toujours très difficile.
Robert Lafont
