Que s’est-il donc passé ce mercredi 2 mars au siège social du célèbre quotidien phocéen, La Provence ? Xavier Niel, le multi-milliardaire, actionnaire minoritaire du groupe de médias, a dû écourter sa réunion et se retrouver sur le perron, suivi de Jean-Christophe Serfati, le PDG, qui ne souhaitait pas sa venue. Reportage sur ce rififi marseillais, au moment où l’offre de reprise de Rodolphe Saadé a été retenue par le Tribunal de Commerce.
Le jour même de cette confrontation avec Xavier Niel, un échange téléphonique se termine : « Venez me voir demain matin à 10h00 », propose Jean-Christophe Serfati, en raccrochant. Après la visite-éclair du célèbre fondateur de Free, qui pèserait aujourd’hui près de 9 milliards d’euros, selon le magazine Forbes, le classant 9è fortune de France, la leçon de courtoisie et d’indignation donnée par une représentante des salariés du groupe, Julia Sanguinetti, et, l’intervention du PDG, Jean-Christophe Serfati, ont fait sortir Xavier Niel de ses gongs, en tout cas, du siège de La Provence. Lors de cette réunion-confrontation, lui-même, excédé, quittait les lieux, comme le confirme une vidéo très explicite, filmée par un des représentants du personnel. De son côté, Xavier Niel, expliquait : « Je suis venu, en tant qu’actionnaire minoritaire, rencontrer les salariés. »
Cette rencontre dans les locaux de La Provence a duré moins de 10 mn, montre en main. Il est, certain, qu’il n’est pas près d’oublier cette mésaventure expresse, digne d’un plan cinématographique à la Scorsese. Justement, la bataille que se livre les deux géants des affaires pourrait très bien prendre des allures du film emblématique où Leonardo DiCapprio, tient le rôle principal, celui du Loup de Wall Street (The Wolf of Wall Street). Y-a-t-il un loup dans la bergerie médiatique phocéenne ?
Dans le train de la reprise
Rodolphe Saadé devance d’une tête Xavier Niel dans le classement des grandes fortunes de France. Le premier est 8è, le second, 9è. Mais, c’est, surtout, dans le cadre de la reprise de ce groupe de médias, que Rodolphe Saadé distance le magnat de la téléphonie mobile et des start-ups, qui est devenu, au fil des millions investis, homme des médias, à l’instar de la génération des Bolloré, des Bouygues et des Dassault. C’est, certainement, dans l’optique de (re)monter dans le train de sa reprise, que dans la matinée du 2, Xavier Niel se rend, donc, à pied, au siège social du groupe. Il est accompagné d’Anthony Maarek, le directeur général de sa holding personnelle, NJJ, et, président de Nice-Matin. Sur place, les deux compères empruntent l’escalier et montent à l’étage où les attendent une quinzaine de personnes, représentants du personnel, élus syndicaux et salariés.
La pièce aménagée pour la réunion est simple, et, ressemble à une salle d’école. Là, les deux hommes s’assoient sur le rebord du bureau. La réunion qui se veut « informelle », selon les propres propos de Xavier Niel, démarre. Julia Sanguinetti salariée du groupe depuis 8 ans, qui occupe les fonctions de responsable de marketing, de communication et d’innovation de Corse-Matin (l’autre quotidien du groupe), se tient debout. Elle est la secrétaire de l’un des six CSE du groupe. Déléguée syndicale, elle est membre du bureau de l’union départementale FO de Corse du sud. Elle prend la parole, au nom de l’intersyndicale présente à ses côtés, et, explique pourquoi elle ne restera pas à cette réunion.
Du rififi à La Provence
« Nous n’allons pas rester à la réunion, mais malgré tout, je tenais à vous expliquer pourquoi », commence-t-elle. Xavier Niel l’écoute attentivement. « D’abord, j’ai trouvé, tout au long de cette procédure qui dure depuis 3 mois, votre comportement extrêmement irrespectueux à l’encontre des représentants du personnel. Cela fait 3 mois que l’on nous consulte, et, on ne vous a pas vu une seule fois. Or, vous débarquez, dans le cadre de la procédure, au moment où votre offre est exclue du jeu. »
Xavier Niel l’interrompt pour lui répondre : « Je viens vous voir en tant qu’actionnaire minoritaire, avec des administrateurs de la société. Je viens vous voir parce que je vous aime bien. Parce que j’adore la presse. Cela fait 35 ans que je fais de la presse. » Puis, il tente de justifier son absence : « Mais cela fait 2 ans qu’on est dans le Covid, Madame ».
La conversation prend des allures de vaudeville. Quelques rires fusent dans la salle. Puis, le ton monte. Anthony Maarek prend alors la main et répond aux accusations : « J’avais le sentiment que la majorité des organisations syndicales souhaitait nous rencontrer. » Julia Sanguinetti lui rétorque : « Il ne faut pas jouer sur les sentiments. » Ensuite, tout s’accélère. Xavier Niel se met debout, mains jointes et lui dit : « Madame, on va être super clair. Si vous souhaitez ne pas me voir. Non, mais je vous le dis franchement. Si vous souhaitez ne pas me voir, je pars, je m’en vais, Madame. »
Xavier Niel prend alors son portable, et, se dirige vers elle. L’échange monte dans les tours et devient vif. Une autre femme interroge Xavier Niel : « Et, pourquoi maintenant, Monsieur Niel ? Alors que cela fait des semaines, des mois, voire des années qu’on aurait, peut-être, eu besoin d’un intérêt de notre actionnaire minoritaire. Sachant que notre entreprise a connu de très très grandes difficultés liées à notre actionnaire majoritaire défaillant. C’est la première fois, alors que l’offre que vous avez déposée dans le cadre de NJJ est caduque, c’est la première fois que vous venez. Aujourd’hui vous venez, parce que vous avez besoin des salariés que vous ignorez depuis des années. »
Un groupe de médias sous pression
La réunion tourne, vraiment, au vaudeville épicé, lorsque Jean-Christophe Serfati, le PDG du groupe nommé par Bernard Tapie en 2017, alerté par la tournure des évènements, entre dans la salle. Il salue Monsieur Niel et Monsieur Maarek. « On a échangé des mails, vous connaissez ma position, je suis, complètement opposé à cette réunion… » Xavier Niel l’interrompt, alors qu’une demi-douzaine de personnes filment la scène. « Donc, vous souhaitez que je parte. » La tension monte d’un cran, les gestes sont expressifs. « C’est ma seule question, Monsieur. Vous êtes le directeur de l’établissement. Est-ce que vous souhaitez que je m’en aille ? C’est ma question et répondez clair. Répondez oui ou non. » Jean-Christophe Serfati, répond « oui ». Xavier Niel prend alors la direction de la sortie, suivi de son acolyte Anthony Maarek et du PDG. Puis, il se retourne : « Vous l’avez souhaité, on est bien d’accord. » Le PDG lui répond : « Je ne vous empêchais pas de faire la réunion, puisque je l’ai faite constater par huissier… »
Xavier Niel s’énerve alors et ne lui laisse pas finir sa phrase : « Mais la question elle est simple Monsieur Serfati. Il faut s’assumer. Vous êtes un employé de CMA-CGM, est-ce que vous me demandez de sortir de cet établissement ? » La pression est à son comble. Elle ressemble à une scène théâtrale, il y a du Feydeau dans l’atmosphère. C’est l’altercation verbale. A son tour, le PDG le stoppe net dans son propos qui ressemble à un monologue : « Qu’est-ce que vous avez dit-là ». Et, Niel de répondre : « Vous êtes un représentant de CMA-CGM. » La discussion s’envenime. Elle se termine par un : « Sortez Monsieur. Anthony, tu sors. » Les deux compères prennent la porte et redescendent l’escalier. La discussion avec les trois hommes s’achève sur le perron de La Provence. La tension est retombée. Xavier Niel s’en va. Finalement, il continuera sa réunion à l’extérieur : « Nous avons vu tous les représentants des salariés pendant 4 heures », expliquera-t-il quelques jours après. Elle a duré jusqu’à 13h30, et, s’est tenue dans les locaux des syndicats.
L’appétit des milliardaires
Ce groupe de média emblématique, en termes de vaudeville et d’échanges verbaux musclés, en a vu d’autres. Alors que Rodolphe Saadé était venu en personne présenter son offre, Xavier Niel, lui, semble avoir loupé la 1ère marche de la communication de son offre de reprise aux salariés du groupe, fondé en 1997. Mais, dans la dernière ligne droite, il veut accélérer, et, prendre des risques. Aguerri, il connaît la musique de ces acquisitions à haut risque médiatique, lui qui reprenait Nice-Matin en mai 2020. Rappelons qu’il est, aussi, à la tête du groupe Le Monde, avec le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky.
Le groupe La Provence est plus modeste. Historiquement, il est issu de la fusion de deux quotidiens Le Provençal et Le Méridional, détenus par l’ancien maire emblématique de Marseille Gaston Defferre. Mais, il faut remonter au 19è siècle, pour voir la naissance de La Jeune République, qui deviendra Le Petit Provençal,et, par la suite Le Provençal.
Dans son bureau, le lendemain matin de cette altercation, 24 heures plus tard, Jean-Christophe Serfati résume l’histoire récente du groupe. « En 2008, c’est le Groupe Hersant qui rachète La Provence. Puis, ce sera Bernard Tapie, qui veut faire son retour à Marseille, qui l’acquière en 2013. Moi, je suis arrivé, il y a presque 5 ans, en mai 2017. C’est Bernard Tapie qui est venu me chercher. » Du côté de Xavier Niel, ce-dernier assure : « Il est impossible de racheter les 89% de La Provence sans notre accord. » La partie n’est, donc, pas terminée.
De Logic-Immo à La Provence
Sur le terrain business, Jean-Christophe Serfati, à 55 ans, est, également, un véritable entrepreneur. Avec son foulard aux couleurs bleu, gris et or, et, aux motifs de cachemire, sa barbe poivre-sel de 3 jours, et ses cheveux gris, qui commencent à se dégarnir, un peu en bataille sur le dessus, il a l’air décontracté. Avec son regard espiègle, il est aux aguets de la bonne et de la mauvaise nouvelle. Il se dit « entrepreneur-heureux », et, cela paraît à travers son sourire.
« Je suis 100% Marseillais », déclare-t-il, comme s’il faisait une déclaration d’amour. Et, qu’il résumait, ainsi, cette situation épique. Lui, n’a pas besoin de se raser pour penser à Marseille tous les jours. Après son BTS, il part entreprendre à…Marseille. A 28 ans, il lance sa success-story : Logimmo, qui deviendra Logic-Immo, à… Marseille « En 1994, avec mon meilleur ami, Mickaël Lacoste, je lance le premier magazine gratuit d’annonces immobilières. 4 ans après, je le revends au groupe Spir Communication. Je reste à la barre, et, je deviens directeur général Médias du groupe. Je le quitte en 2012, pour me consacrer à de nouveaux projets. J’avais besoin de retrouver mon âme d’entrepreneur, même si l’aventure avec Philippe Léoni, le fondateur du groupe Spir, était une très belle aventure. D’ailleurs de ces années est née une amitié.» Entre 2012 et 2016, il lance plusieurs entreprises, toujours dans le même secteur. Fin 2016, Bernard Tapie l’invite à dîner, et, lui propose de devenir le PDG de La Provence, qui couvre 3 départements : les Alpes-de-Haute-Provence (04), les Bouches-du-Rhône (13) et le Vaucluse (84). Corse-Matin, étant diffusé, en Corse !
« Oui, j’étais ravi que Bernard Tapie me fasse cette proposition. J’aime le monde des médias. Et, j’aime encore plus Marseille », ajoute-t-il en souriant. La suite n’est pas un long fleuve tranquille. Jean-Christophe Serfati navigue dans des eaux qui deviennent saumâtres, voire troubles, en raison des affaires judiciaires du principal actionnaire et des problèmes de rentabilité. En 2019, la participation de 11% que détenait le groupe belge Nethys est cédée à Xavier Niel. En 2020, l’étau judicaire se resserre autour de « Nanard » (le surnom de Bernard Tapie). Et, depuis avril 2020, le Groupe Bernard Tapie est en liquidation. Le liquidateur judiciaire, Me Xavier Brouard, a reçu en novembre 2021 deux offres de reprise des 89 % des participations de GBT : celle de Xavier Niel et celle de Rodolphe Saadé.
Le mastodonte des mers aime les médias
A l’instar de Vincent Bolloré, autre géant logisticien, en Afrique principalement, Rodolphe Saadé appartient à une famille d’entrepreneurs. Comme Vincent Bolloré, qui, lui, a une génération d’avance, Rodolphe Saadé commence à regarder le monde des médias de très près. Autre point commun : ce sont des hommes de l’ombre, qui aiment la discrétion. Enfin, les deux hommes se ressemblent, par leur esprit d’indépendance. En outre, le Groupe Bolloré vient de souffler ses 200 bougies (en février dernier) et le Groupe CMA-CGM fêtera ses 200 ans en… 2051 ! Au départ, l’histoire est bien différente.
Jacques Saadé, le père, qui est né en 1937 à Beyrouth, et, qui s’est endormi dans la mort en 2018, à Marseille, démarre sa vie entrepreneuriale en reprenant la société familiale. « Nous avions des usines en Syrie. On produisait du tabac, du coton, de l’huile d’olive, etc. », répondait-il, il y a quelques années, à une journaliste du Point, Marie Bordet. Au Liban, la guerre civile fait rage. En 1978, il décide de quitter le Liban avec sa famille. Après Beyrouth, il s’installe à Marseille. A Marseille, il repart de zéro et lance la Compagnie maritime d’affrètement, la CMA. 18 ans plus tard, en 1996, il acquière la Compagnie générale maritime, la CGM.
Dans la famille Saadé, demandez le fils
Deux ans auparavant, en 1994, son fils l’a rejoint. Lui-aussi est né à Beyrouth, en 1970. Il devient PDG du groupe en 2017. Son père a été pionnier dans l’ouverture de nouvelles lignes de transit maritime, en commençant par la ligne Marseille-Livourne-Lattaquié. La première, il y a 40 ans. Ensuite, il fait naviguer ses bateaux en mer de Chine. Rodolphe, se distingue parce qu’il est l’homme des fusions-acquisitions, et, de la digitalisation du groupe. Après avoir participé, aux côtés de son père, au développement du groupe familial (la famille détient 70 % du groupe), Rodolphe travaille, actuellement, sur deux dossiers majeurs : celui du rachat de Bolloré Logistics, qui ferait de son groupe le numéro deux mondial. En 45 ans, le groupe familial est passé de 4 salariés à 130 000, et, de 100 000 euros de chiffres d’affaires, à 50 milliards.
Mais, un autre dossier est sur sa table : celui de La Provence. Car Rodolphe Saadé, s’il a décidé de se diversifier, notamment, dans le transport aérien, a décidé de devenir un magnat des médias. En 2019, il avait, déjà, essayé de mettre un pied dans La Provence en devenant actionnaire minoritaire, et, en rachetant les parts de Nethys. Sans succès. Cette fois-ci, il semble avoir pris une longueur d’avance sur Xavier Niel.
Les affaires Tapie
Pas simple de s’y retrouver dans la procédure de cette liquidation judiciaire. Essayons cette synthèse chronologique, en commençant par celui qui la personnifie : Bernard Tapie. Il a eu de multiples vies. Et, sa vie judiciaire, elle-même, est hors-norme. En 2007, lors de l’affaire Adidas, un arbitrage entre les parties est mis sur pied, qui débouche l’année d’après sur une sentence arbitrale favorable à l’entrepreneur. Avec ses 403 millions d’euros qu’il empoche, Bernard Tapie rachète La Provence, en 2013. En 2015, ses affaires judiciaires rebondissent, lors de sa condamnation, par la cour d’appel de Paris, à rembourser les fameux 403 millions d’euros. Nouveau rebondissement, il y a tout juste deux ans, cette cour place en redressement judiciaire le Groupe Bernard Tapie. En avril 2020, le tribunal de commerce prononce sa liquidation. Atteint d’un cancer – autre combat qu’il aura dû mener – Bernard Tapie s’éteint le 3 octobre 2021. La situation économique de La Provence ne s’améliore pas. Le groupe est dans le rouge depuis 2013. La dernière fois où il a été bénéficiaire, c’était en 2009 ! Jean-Christophe Serfati a dû, pour renflouer les caisses, et, assurer le court et moyen terme, opérer la vente du terrain de 2,3 ha sur lequel se situe le siège social et l’imprimerie. Xavier Niel, de son côté, il y a quelques mois a prêté 2,3 millions d’euros au journal, en attendant les jours heureux.
Quant au liquidateur judiciaire, Me Xavier Brouard, il a attendu jusqu’au 30 novembre dernier pour recevoir les offres des 4 candidats à la reprise. En jeu les 89% de GBT. Seules 2 seront déposées.
« L’offre de Rodolphe Saadé est vraiment significative », explique Serfati. En effet, elle est 4 fois plus importante que celle de Xavier Niel. Ce-dernier a proposé une enveloppe globale de 20 millions d’euros, alors que Saadé propose 81 millions. Le tribunal de commerce a, par conséquent, sélectionné la « mieux disante ».
De son côté, Xavier Niel, qui n’est pas à quelques millions près, explique que « le liquidateur a fait une expertise de la valeur de La Provence, qui la chiffre à 20 millions d’euros, sans tenir compte du coût du papier, ni de la crise russe. »
Les salariés sont « très inquiets »
On l’a vu avec ce vaudeville marseillais, plus que symbolique, les salariés sont sur le qui-vive. Pire, ils sont inquiets. Comme le précise Julia Sanguinetti : « Oui, nous sommes très inquiets, car les chiffres du groupe sont, toujours, dans le rouge. Le temps joue contre nous… ». Ils comptent, cependant, défendre l’activité du groupe qui respire avec ses deux poumons : marseillais et corse. Ils espèrent, aussi, défendre leurs droits et leurs. Elle ajoute : « On tient à témoigner à la fois de nos inquiétudes, de notre colère et de notre indignation. On a l’impression que les 850 salariés sont pris au piège…On défend nos intérêts.» De quel piège parle-t-elle ? De cette seconde procédure d’appel d’offres lancée par les liquidateurs, le 1er février dernier. Mais c’est un piège de courte durée, puisqu’aucune nouvelle offre n’avait été déposée le 14 février, à la clôture de l’appel.
L’heure est, donc, de nouveau, à l’étude du seul dossier de reprise : celui de Rodolphe Saadé. « Le 28 mars aura lieu le comité d’entreprise extraordinaire », confie Serfati. Ce jour-là, l’offre de Saadé sera passée au crible et au vote. Saadé, avant Niel, était, déjà, monté dans le navire amiral de la petite flottille provençale, lorsqu’il avait personnellement présenté son offre aux salariés. Pourquoi son challenger, avec ses 11% de participation, ne l’a-t-il pas fait avant lui ? Mystère. Il en avait le droit et la légitimité. La polémique et les jeux de rôle et d’influence ont fait le reste auprès des salariés, qui sont minoritairement divisés sur le sujet. Selon le PDG, seuls 20 % des salariés et de ses représentants soutiendraient Xavier Niel. Ce qui laisserait le champ libre à Rodolphe Saadé, sur le terrain de la reprise. A suivre…
Fin de partie avant l’été ?
Les 250 journalistes, sur les 850 salariés au total, vont bientôt, comme un seul homme, remonter tous sur le pont. Ils vont pouvoir regarder, avec sérénité, le nouvel horizon qui se présente à eux. Même s’ils restent, aujourd’hui, encore « très inquiets ». « Dans cette tempête mouvementée, je me dois de rester neutre. Nous avançons dans la bonne direction. Et, notre cap stratégique est axé sur la digitalisation, la croissance organique, et, la croissance externe. Nous devons, enfin, nous diversifier, comme nous le faisons en créant des évènements, comme le salon Nautical. », conclut le PDG. Il est confiant, et, regarde vers l’avenir. Il veut s’amarrer au cap des 100 millions d’euros de chiffre d’affaires, à réaliser dans les 5 ans. Il veut renouer avec la rentabilité, et, devenir bénéficiaire. Il aura, cependant, à gérer sa dette qui dépasse les 30 millions d’euros.
Avec ses 100 000 exemplaires diffusés quotidiennement (Corse-Matin, 25 000, et, La Provence, 75 000), le vent du groupe soufflera-t-il bientôt dans la bonne direction, alors que des vents contraires se sont levés ? Si oui, les meilleurs pronostics concluraient à une reprise définitive du groupe par le tandem Niel-Saadé – le 1er restant minoritaire – avant l’été 2022. Le groupe pourrait alors hisser la grand-voile dès le mois de juillet, et, avancer au large. Lorsque la procédure de rachat aura pris fin. La Provence et Corse-Matin écriront de nouvelles pages, des « good news ».
A l’heure où nous bouclons, il est bon de rappeler que Xavier Niel et ses associés font partie des rares éditeurs de presse « rentables sur 100% des médias hexagonaux ». Ils détiennent, entre autres, Le Monde, Télérama, Courrier International, La Vie, Le Monde Diplomatique, Nice Matin et Var Matin, pour n’en citer que quelques-uns. On comprend mieux, alors, le multi-milliardaire quand il dit : « J’aime la presse ». C’est un gourmand, il la dévore ! Pour l’heure, espérons, que tout ceci se termine autour d’une bonne bouillabaisse. Qu’un jour de fête, à la Jacques Tati, proclame le rachat définitif de La Provence, dans les meilleures conditions possibles. Il y a urgence !