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ZérOptical : le conquérant de l’optique

Bouillonnant de projets, le Marseillais Marc Lemaire, fondateur de Zéroptical en 2020, s’est mis en tête de construire le premier réseau d’optique d’ici 4 ans. Entrepreneur à l’esprit avant-gardiste, il révolutionne le secteur de l’optique en introduisant des corners dans les pharmacies. Au plan marketing, il propose une deuxième paire offerte en plus des lunettes de vues intégralement remboursées. On croyait le marché de l’optique déjà bien occupé. L’outsider de ZérOptical montre qu’on peut toujours se faire une place.

Marc Lemaire

Comment êtes-vous devenu entrepreneur ?

Marc Lemaire : Autodidacte, avec un simple Bac, j’ai rapidement intégré le monde professionnel en démarrant ma carrière en tant que communicant dans le domaine de la publicité. J’ai initié une multitude de projets qui ont souvent abouti à des réussites notables. J’ai cependant fait l’expérience de certains échecs, qui ont été des moments d’apprentissage essentiels pour moi.

Vous prônez de s’essayer à de nombreux défis…

Oui, j’ai un parcours atypique, jalonné d’expériences éclectiques dans différents secteurs, mais j’ai toujours été guidé par la volonté d’innover et de créer. Après un passage par la radio, j’ai fondé une agence de communication indépendante qui me permettra, entre autres, de diriger la campagne électorale de Občanské Fórum, le parti de Vaclav Havel en Tchécoslovaquie en 1990.

Après une belle victoire aux élections, j’ai implanté le premier réseau d’affichage 4X3 à Prague, Brno et Bratislava pour Avenir Havas Média. Mon séjour de deux ans aux États-Unis, à Miami, a été déterminant pour la suite de mon parcours : j’y ai découvert le concept de la « food delivery » que j’ai ensuite introduit en France. J’ai lancé la première plateforme de livraison à domicile des cuisines du monde « Télédiner », précurseur de Deliveroo et Uber Eats. Cette initiative m’a valu d’être récompensé par le livre « Guinness des records » en 1996. Cette aventure a perduré pendant quatre ans avant que je ne cède l’entreprise, qui est devenue une société prospère toujours en activité aujourd’hui.

J’ai également été l’un des pionniers dans le domaine de la lettre recommandée dématérialisée et du coffre-fort numérique dès l’an 2000. Malheureusement, cette initiative n’a pas rencontré le succès escompté, car nous étions en avance sur notre temps. Ce projet a été très chronophage et a mobilisé des investissements considérables.

Cet insuccès m’a démontré l’importance de la patience et de ne pas se lancer dans une nouvelle aventure sans être certain d’être dans le bon timing. J’ai même été associé dans un projet de développement de cosmétiques en collaboration avec Adriana Karembeu.

Quel type d’entrepreneur êtes-vous ?

Je suis un créateur et un développeur dans l’âme, mais je ne suis pas un gestionnaire. Il arrive un moment où je me lasse si l’activité devient redondante. J’aime donner l’impulsion de départ, lancer des projets, les construire, mais lorsque cela commence à devenir monotone et routinier, mon intérêt s’amenuise et je n’ai plus la même fougue pour poursuivre.

Je me suis quand même patiné avec l’âge et mes projets durent désormais beaucoup plus longtemps. J’aime par-dessus tout être avant-gardiste, casser les codes et disrupter le marché en faisant quelque chose que personne n’a jamais fait. Je trouve cela fascinant. D’où vous vient cette passion pour le padel ?

Je suis un passionné de sport, avec une affinité particulière pour le tennis et désormais pour le padel, qui incarne une philosophie de vie qui me parle profondément. Le padel offre les avantages du tennis tout en éliminant certaines contraintes, et il crée une atmosphère conviviale qui me correspond. J’attache une importance particulière à avoir une certaine qualité de vie, j’ai besoin d’avoir des moments à moi et de disposer d’une heure lorsque j’en ressens le besoin.

Quelles sont vos valeurs en matière de management ?

Je crois beaucoup au travail d’équipe et au phénomène d’émulation de groupe. Mon parcours fait que je suis moins regardant sur les diplômes et plus attentif aux personnalités et au savoir-être. J’aime travailler avec des gens avec qui je m’entends et évoluer dans une ambiance positive. Lorsque je recrute un collaborateur, je me pose toujours la question de savoir si je pourrais passer une soirée avec lui.

J’ai besoin de m’assurer que nous partageons la même philosophie, que nous sommes portés par les mêmes motivations et que nous avons envie d’avancer et de construire ensemble. L’âge et l’expérience nous offrent le privilège de pouvoir sélectionner avec soin nos partenaires et collaborateurs. Fédérer un groupe autour d’un projet commun est particulièrement vertueux pour l’entreprise.

En matière de recrutement, j’ai à cœur de valider chaque candidat, en particulier pour les postes stratégiques au sein de l’entreprise afin de garantir une dynamique d’ensemble cohérente.

Pourquoi vous êtes-vous tourné vers le secteur de l’optique ?

Il y a une dizaine d’années, je me suis retrouvé dans ce secteur un peu par hasard, en prenant les rênes de la direction générale d’un fabricant de lunettes, International Frame Company. J’ai impulsé une dynamique nouvelle à cette entreprise en la conduisant sur le marché émergent de la deuxième paire de lunettes, où une opportunité se dessinait.

Cette orientation stratégique nous a permis de multiplier par trois le chiffre d’affaires de la société. Suite à la vente de cette entreprise, j’ai choisi de poursuivre dans cette voie en fondant Novavizion, qui est devenu l’un des leaders mondiaux des montures « access quality ». L’entreprise est présente dans 23 pays à travers le monde, avec la France comme marché principal.

De manière surprenante, le marché français se positionne comme le plus important au niveau mondial par habitant, en raison d’une couverture sociale permettant le remboursement intégral. Il est d’usage en France que chacun renouvelle sa paire de lunettes à date anniversaire.

Comment le projet ZérOptical a-t-il vu le jour en 2020 ?

Ce projet, financé sur mes fonds personnels au cours des deux premières années, a rapidement pris de l’ampleur. Notre succès s’est bâti sur les leçons tirées des échecs qui se sont avérés nécessaires pour notre croissance.

Ne connaissant pas le monde de la pharmacie au départ, j’ai entrepris de créer des magasins en étant convaincu de la pertinence de ce modèle. Grâce à l’arrivée de mon associé, Laurent Lesserteur, qui apportait son expertise du monde de la pharmacie et qui a rejoint notre capital, nous avons eu l’idée novatrice de créer un corner optique centré sur le principe du « 100% Santé 100% Remboursé », en parfaite cohérence avec la philosophie de la pharmacie.

Ensemble, nous avons élaboré un projet basé sur des concepts tels que l’optimisation de l’espace, la maximisation de l’offre produits et la réintégration de services au sein de l’officine. Nous avons rapidement pris conscience de la demande croissante émanant des pharmacies, très réceptives au concept du « 100% Santé ».

En effet, avec la totalité de la population française qui franchit les portes des pharmacies en l’espace de seulement trois mois et demi, le flux de personnes dans ces officines est tout simplement phénoménal, atteignant entre 100 et 1 500 personnes par jour dans une seule pharmacie.

Comment les pharmacies ont-elles perçu votre démarche ?

Nous avons réalisé que les pharmacies étaient en quête de renouveau et de nouveaux services, surtout après avoir perdu un nombre considérable de produits tels que les couches, l’eau minérale, les yaourts, et même frôlé la perte du Doliprane il y a peu.

Beaucoup de pharmacies sont réceptives et ont compris le sens de notre initiative, mais certaines s’interrogent encore car elles pensent ne pas disposer de l’espace nécessaire. Ce qui est faux, car nous avons conçu de véritables corners qui occupent seulement 3,5 mètres linéaires et qui offrent dix fois plus de choix que ce que propose un magasin d’optique classique ou une enseigne suivant le modèle du « 100% Santé ».

Au fil du temps, nous avons enrichi notre offre en proposant des licences de marques, des lunettes de soleil Ray-Ban toute l’année, ainsi que la deuxième paire même dans le cadre du panier A. Cette évolution a été rendue possible grâce à nos partenaires : nos adhérents Zéroptical qui ont contribué à notre croissance, et les opticiens, salariés des officines, qui ont fait progresser notre projet.

Quelle valeur ajoutée apportez-vous aux pharmacies ?

Cette initiative vise à créer un pôle de santé complet de proximité et accessible à tous. Les avantages sont multiples : un espace dédié à l’optique, des montures de lunettes exclusives, des verres de qualité fabriqués en Europe, ainsi qu’un accompagnement très qualitatif. En rejoignant notre réseau, les pharmaciens bénéficient de notre expertise et d’un levier de communication percutant et efficace à l’échelle locale et nationale.

Comment avez-vous pressenti la révolution qui allait s’opérer dans le secteur de l’optique ?

Sans faire de politique, « sur ce coup-là », je dois remercier notre Président, car sans la loi Macron, Zéroptical n’existerait pas. La mise en place du « quoi qu’il en coûte » m’a permis de maintenir mon activité pendant huit mois en travaillant à mon domicile tout en percevant des subventions substantielles. Cette période m’a offert l’opportunité de prendre du recul sur mon activité et de réaliser que le monde de l’optique était en train de subir des changements profonds avec la mise en place du dispositif « 100% Santé ».

Quel accueil le « 100% Santé » lancé en 2020 a-t-il reçu auprès des professionnels ?

Les professionnels de santé étaient en profond désaccord avec le « 100% Santé » optique, audio et dentaire, mais ils s’y sont conformés par peur des contrôles et des amendes encourues. Deux mois après la mise en place du dispositif, la pandémie de Covid-19 faisait rage et créait un climat particulièrement délétère pour le lancement du « 100% Santé ». Aucune communication n’a été menée pour informer les personnes.

La situation fut pour le moins compliquée pour nombre d’acteurs, et particulièrement pour les opticiens qui ont dû rester ouverts sans bénéficier de subventions, alors que les ophtalmologistes étaient fermés. Ils ont vécu cette crise de plein fouet.

Quelle erreur stratégique les opticiens ont-ils commis ?

Conformément à la loi, tous les opticiens et les points d’optique sont tenus de proposer en priorité des produits relevant du dispositif « 100% Santé ». Pour être en conformité, un opticien doit offrir au moins 54 montures éligibles au « 100% Santé ». Parmi ces montures, la loi impose déjà 20 modèles destinés aux enfants, et si vous êtes une femme, une partie des montures pour hommes sera également écartée, ce qui laisse environ une quinzaine de choix restants.

De plus, si vous préférez les montures métalliques aux montures en plastique, le choix se réduit souvent à quelques modèles peu attrayants, car les opticiens ont tendance à rendre ces produits peu attractifs, insinuant qu’ils sont destinés à une clientèle moins aisée. Beaucoup de personnes se tournent alors assez naturellement vers le panier B, qui propose des produits payants avec un reste à charge à payer.

Les opticiens ont commis une erreur significative car nous sommes peut-être l’un des seuls pays, voire le seul, où le renouvellement des équipements optiques tous les ans ou deux ans est très courant, car il n’est pas payant et entièrement remboursé. Dès lors que les gens ont à débourser 300, 400, 800 ou 1 000€, le renouvellement devient extrêmement compliqué, car ils vont préférer conserver leurs lunettes plus longtemps.

Quels sont les facteurs différenciants de Zéroptical ?

Dès lors que vous disposez d’un renouvellement d’ordonnance, vous ne payez pas vos nouvelles lunettes. Nous proposons par ailleurs une offre très large de 540 modèles en présentation, bien au-delà de l’exigence légale des 54 montures. De plus, une grande partie de notre offre, environ les deux tiers, est éligible au remboursement intégral à 100%.

En outre, nous proposons également des marques renommées, tout en maintenant un reste à charge très modéré pour nos clients. Cette stratégie nous permet de répondre aux besoins et aux préférences diversifiés de notre clientèle, tout en garantissant un accès facile à des produits de qualité.

Parlez-nous de la nouvelle offre « la seconde paire offerte » lancée en mars par Zéroptical.

En plus de bénéficier d’une paire de lunettes entièrement remboursée, avec des montures et des verres de qualité, nous repoussons les limites en offrant également une seconde paire sur le panier A, sur des montures éligibles au « 100% Remboursé ». Il s’agit d’une offre sans précédent que personne d’autre n’a jamais osé proposer.

En quoi consiste concrètement la deuxième paire offerte ?

On parle communément de la « deuxième paire offerte », mais en réalité, nous sommes dans l’obligation de la facturer à un tarif d’un euro, car il s’agit d’un dispositif médical.

Garantissez-vous un niveau de qualité équivalent malgré cette offre ?

Il est important de préciser que les verres de la seconde paire offerte sont de qualité identique à ceux de la première paire. En effet, nous procédons à un processus de clonage des verres lors de la fabrication, ce qui signifie que vous bénéficiez de quatre verres au lieu de deux, tous de la même qualité. Il est d’usage dans les enseignes et les magasins indépendants que les verres de la deuxième soient d’une qualité inférieure à ceux de la première paire achetée.

Vous semblez avoir de grosses ambitions pour l’avenir…

L’arrivée de nouveaux partenaires financiers avant l’été va insuffler une nouvelle dynamique à Zéroptical et nous donner des moyens supplémentaires pour soutenir notre développement. Cela ouvre de nouvelles perspectives passionnantes pour l’avenir de notre entreprise. Aujourd’hui, nous avoisinons les 100 unités. J’ai pour ambition de monter 1 000 corners afin de devenir le premier réseau d’optique devant Optical Center, Afflelou et Optic 2000. Je me suis fixé 4 ans pour réaliser cet objectif.

La liste est longue mais je peux vous annoncer les prochaines ouvertures qui auront lieu avant l’été : Marseille (13), Agen (47), Aix-en-Provence (13), Bezons (95), Chinon (37), Montauban (82), Paron (89), Rixheim (68), Sète (34), Vétraz-Monthoux (74), Volx (04), Melun (77), Moissy-Cramayel (77), Aix-les-bains (73)…

Continuer à étendre notre implantation à un rythme soutenu est essentiel pour atteindre notre objectif mais, comme je le dis souvent, le plus complexe était de monter le premier corner… Une fois l’objectif des 1 000 corners atteint, mon rôle prendra fin, et je laisserai donc ma place à des personnes plus compétentes pour gérer et pérenniser cette belle histoire.

Vous ne semblez pas craindre la concurrence…

Actuellement, nous sommes les seuls à proposer un « check-up de l’équilibre de la vision » réalisé à l’aide d’un casque de réalité virtuelle. De plus, nous explorons de nombreux domaines, comme la télémédecine, par exemple, pour le renouvellement des ordonnances. Nous demeurons fermement positionnés sur notre créneau tout en consolidant notre position dominante. Notre objectif est de rendre la tâche difficile à tous ceux qui pourraient éventuellement tenter de nous concurrencer à l’avenir.

La mise en place de la seconde paire dans notre offre n’est pas anodine, elle renforce notre positionnement unique. Nous offrons une solution complète que nous sommes les seuls à pouvoir fournir, principalement axée sur le « 100% Remboursé ».

Propos recueillis par Isabelle Jouanneau


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